, par
bouture, qu'une branche de saule que vous detachez est un saule que vous
detachez de plusieurs saules. Il est vrai; mais il y a des animaux pour
lesquels il en va exactement de la meme facon. Tels l'hydre d'eau douce,
et la plupart des autres polypes; en sorte que le naturaliste hesite
et ne sait, en presence du polype, s'il a affaire a un animal ou a un
vegetal; et c'est, en effet, qu'ils ne sont l'un ni l'autre, mais une
transition obscure et mysterieuse entre l'un et l'autre regne.
Et a l'inverse il y a des animaux, incontestablement animaux, doues de
sensibilite, se contractant tout entiers a une blessure, individus _uns_
par consequent, qui cependant par certains caracteres sont au-dessous
d'un grand nombre de vegetaux, comme par certains autres ils sont
au-dessus. L'huitre est plus immobile, plus passive que la vallisnerie,
plus inapte a saisir la proie que tel vegetal carnivore qui attrape les
mouches, sensible au choc et a la piqure autant, mais ni plus ni moins,
peut-etre moins, que la sensitive.--Et d'une facon generale il est vrai
que l'animal veut, poursuit un hut, evite un obstacle; mais le vegetal
aussi, quoique moins ingenieusement: de ses racines il cherche la
nourriture propice, contourne les rocs, s'allonge vers sa proie; de
ses feuilles il cherche cette autre nourriture qui lui vient de l'air
(l'acide carbonique), contourne les obstacles, s'allonge vers les
sources de vie.
Voila nos limites qui gauchissent el ploient sous les faits. C'est que
ce sont, en effet, _nos_ limites, et non celles de la nature, qui n'en
connait pas. Ce sont des idees generales que nous nous faisons pour nous
aider. "Elles ont le defaut de ne pouvoir jamais tout comprendre.
_Elles sont opposees_, meme, _a la marche de la nature_ qui se fait
uniformement, insensiblement _et toujours particulierement_." Comptez
que la nature se moque de nous. Elle semble prendre plaisir a
deconcerter a l'idee que nous nous faisons d'elle. Par exemple elle a
cette premiere singularite de permettre aux pucerons de se reproduire
sans union sexuelle, et ne nous laissant pas sur cette surprise, elle
double le paradoxe en leur permettant de se reproduire _aussi_ par
accouplement. C'est un artiste qui varie extremement et comme a l'infini
ses imaginations, ses combinaisons, ses reveries realisees, et l'on
serait tente de dire ses divertissements et ses caprices.
Pareillement, il sera toujours impossible de marquer la limite
absolument preci
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