ue le jour ou les lumieres, et la morale
avec elles, penetreront dans les diverses classes de la societe...
l'instruction diminuera tot ou tard, mais infailliblement, les maux de
l'espece humaine, jusqu'a rendre sa condition la plus douce dont soient
susceptibles des etres perissables."
Tout a fait a la fin de sa carriere, dans son discours posthume sur la
liberte de la presse, il ecrivait encore: "Un bon livre est doue d'une
vie active, comme l'ame qui le produit; il conserve cette prerogative
des facultes vivantes qui lui donnent le jour. Le bienfait d'un livre
utile s'etend sur la nation entiere, sur les generations a venir; il
grandit, il feconde l'intelligence humaine; il multiplie, il prolonge,
il propage, il eternise l'influence des lumieres et des vertus, de la
raison et du genie; c'est leur essence pure et precieuse que l'avenir ne
verra pas s'evaporer; c'est une sorte d'apotheose que l'homme superieur
donne a son esprit afin qu'il survive a son enveloppe perissable...."
L'humanite cherchant peniblement sa voie que personne ne lui a enseignee
dans le principe, ayant en elle-meme, mais tres enveloppee et confuse,
une lumiere, qu'elle cherche a degager; les hommes superieurs
depositaires particuliers de cette lumiere, la faisant paraitre plus
vive et plus penetrante par intervalles et formant ainsi comme une
providence collective et successive; et a leur suite l'humanite marchant
lentement d'abord, de plus en plus vite ensuite, grace a l'accumulation
des notions nouvelles sur les anciennes qui ne se perdent point, vers un
avenir assure de grandeur, de concorde, de bonheur et de pleine clarte:
voila la grande theorie du progres par la raison, qui a toujours
ete, plus ou moins, un des beaux reves de l'espece humaine, et qui
certainement est une de ses raisons d'etre et un de ses principes de
vie, mais qui n'a jamais ete embrassee d'une foi plus vive et d'une plus
entiere assurance que par les hommes du XVIIIe siecle.--C'est bien la
croyance que se donne Mirabeau, c'est bien sa conception generale et
son idee maitresse. C'est ce qui l'a le plus soutenu dans ses luttes,
encourage dans ses resistances et anime dans les assauts qu'il a donnes.
C'est le plus noble, s'il etait sincere, des divers mobiles qui ont agi
en lui.
Ce qui le distingue des hommes de son temps, c'est que dans tout son
romanesque et a travers toutes ses fougues, et parmi les fumees, souvent
epaisses, de son temperament de satyre, de son imagin
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