est orateur plus
encore, orateur plus abondant, plus periodique, plus largement epandu
quand il ecrit que quand il parle, et dans le _Courrier de Provence_,
par exemple, que dans le discours sur la sanction royale; et c'est
plutot l'ecrivain orateur plus contenu, plus serre et plus presse qu'il
apporte a la tribune, que ce n'est l'orateur empeche et comprime qui
s'essaie dans ses ecrits.--Il a appris a ecrire dans Diderot et dans
Rousseau, ou plutot, familier et assidu lecteur des ecrivains a
temperament oratoire, il n'a pas appris a ecrire, mais il a _parle_,
avec l'abondance de Diderot, et sans le souci du style de Rousseau,
une multitude de pamphlets, de factums, de traites et de lettres; puis
abordant la tribune, il a _parle_, mais avec plus de retenue et de
circonspection, des discours, amples encore, mais severement ordonnes,
surveilles, et marchant plus ferme et plus vite au but.
Son defaut, comme il est celui de presque tous les orateurs, est le
manque de variete. Le ton est presque toujours le meme, la phrase,
presque toujours, se deroule du meme mouvement majestueux et imposant.
Il a un peu de cette "eloquence continue" dont parle Pascal. Ici encore
ses discours valent mieux que ses ecrits, parce que quand il parlait, il
etait interrompu, et chez lui la replique, presque toujours heureuse,
et toujours puissante, est comme une brusque saillie qui releve le
discours, ou comme un cri vigoureux qui change et hausse le ton.--Ses
debuts sont lents, embarrasses et declamatoires, et, chose a remarquer,
il en est de meme sur ce point dans ses lettres et dans ses discours.
Ses lettres commencent presque toutes par une serie d'exclamations assez
froides dans le gout de la _Nouvelle Heloise_, et, a la premiere page,
sonnent le creux. La veritable chaleur arrive ensuite. Ses discours,
souvent du moins, commencent par un exorde un peu pompeux, qui semble
trop prepare et trop ecrit; la vigueur d'argumentation, la dialectique
serree et puissante, et une sorte de plain pied avec l'auditeur, ou de
contact sensible avec l'homme a convaincre ou a reduire, paraissent plus
tard; et alors plus de declamation, plus de pompe, plus d'appareil,
et quelque chose de vraiment vivant dans la souplesse robuste des
raisonnements, qui sans hate, mais sans arret, ni langueur, enlacent,
serrent, pesent, redoublent, et font tout ployer.--Il est a peine besoin
de noter les incorrections, les neologismes un peu bizarres quelquefois,
et qui etaien
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