r de ce principe que la souverainete appartient a la nation, et en
conclure qu'il fallait oter le gouvernement au roi et le concentrer dans
l'Assemblee nationale, voila le fond de la Constituante comme de toute
la Revolution. La Constituante, en theorie du moins, a ete la premiere
Convention. Elle a cru que la liberte consiste a etre gouverne par des
maitres qu'on a choisis; que, du moment qu'elle est elue, une assemblee
ne peut pas etre tyrannique, qu'une nation libre, c'est le despotisme
exerce par une Chambre; que le despotisme transporte du roi a un Senat,
c'est une nation affranchie.
Voila l'absurdite que Mirabeau a vue du premier coup, et qu'il a
combattue constamment pendant toute son existence parlementaire.
A travers la Constituante, il a vu la Convention, et a travers la
Convention le retablissement du pouvoir absolu. Je n'exagere aucunement
son admirable prevoyance. Voici sa prophetie qui n'est point obscure,
qui n'est point sommaire, qui, au contraire des ordinaires propheties,
entre dans le detail; voici son histoire de la Revolution ecrite a
l'avance, dans le _Courrier de Provence_, en 1789:
"Si une nation se montrait plus desireuse du bien public qu'experimentee
dans l'art de l'effectuer; si une carriere toute nouvelle d'egalite, de
liberte et de bonheur trouvait dans les esprits plus d'ardeur pour s'y
precipiter que de mesure pour la parcourir; si l'esprit legislatif
etait encore chez elle un esprit a naitre, une disposition a former;
si quelques traces de precipitation et d'immaturite marquaient deja
l'avenue legislative ou elle est entree, conviendrait-il de n'environner
les legislateurs d'aucune barriere et de leur livrer ainsi sans defense
le sort du trone et de la nation?--Les sages democraties se sont
limitees elles-memes.... A plus forte raison, dans une monarchie ou
les fonctions du pouvoir legislatif sont confiees a une assemblee
representative, la nation doit-elle etre jalouse de la moderer, de
l'assujettir a des formes severes _et de premunir sa propre liberte
contre les atteintes et la degeneration d'un tel pouvoir_.--Quand le
pouvoir executif, sans frein et sans regle, en est a son dernier terme,
il se dissout de lui-meme, et tous reparent alors les fautes d'un seul;
nous n'irons pas loin en chercher un exemple. _Mais si la revolution
etait inversee; si le Corps legislatif, avec de grands moyens de devenir
ambitieux et oppresseur, le devenait en effet_; s'il forcait un jour la
nation a se
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