ermes les plus generaux" (ce qu'il
se garde bien de faire, je vous prie de le croire, quand il parle
geologie), par les termes les plus generaux, c'est-a-dire par les termes
abstraits et les periphrases. Rien n'est moins naturel, rien n'est plus
apprete. Precisement! c'est que Buffon aime le naturel en ce qu'il
deteste l'esprit de pointes; mais il aime aussi l'appret, l'arrangement,
l'appareil, une certaine coquetterie de style, toutes choses qui, de
leur cote, sont le contraire du naturel, du premier mouvement, de la
naivete.--Voulez-vous un criterium infaillible pour juger de la justesse
d'une theorie litteraire? Voyez si elle explique ou si elle contredit La
Fontaine. La Fontaine juge au point de vue du _Discours sur le style_,
est mauvais. La question est tranchee: c'est le _Discours sur le style_
qui a tort.
Disons tout cela parce qu'il faut le dire et se rendre compte et des
lacunes et des erreurs de ce petit traite si fecond, tout au moins, en
reflexions. Mais en finissant comme nous avons commence, prenons-le en
lui-meme et pour ce qu'il est. Il est une _vue_ sur l'art d'ecrire,
rapidement presentee par un savant, grand ecrivain, a l'usage des
savants qui voudront ecrire. Il est un petit traite d'_exposition
scientifique_. A ce titre il n'est pas eloigne d'etre excellent. Comment
faut-il s'y prendre pour ecrire l'_Histoire naturelle_ de M. de Buffon,
ce discours le dit; comment faudra-t-il s'y prendre pour ecrire des
ouvrages du meme genre, ce discours l'enseigne; et c'est quelque chose.
Il y a eu une epoque ou le _Discours sur le style_ etait considere
comme la loi supreme de l'art d'ecrire. C'est le temps ou d'illustres
professeurs avaient apporte dans les chaires superieures de l'Universite
ces qualites d'exposition large et eloquente dont le _Discours sur le
style_ donne la lecon et l'exemple. Il est, en effet, et la regle et le
modele de cette eloquence particuliere, intermediaire, qui n'est ni la
simple et profonde eloquence du coeur et de la passion, ni l'eloquence
de la tribune ou de la chaire ou l'imagination a tant de part, mais
l'eloquence au service de l'enseignement, tendant a instruire d'une
facon elevee et avec une maniere imposante, plutot qu'a toucher et a
emouvoir. Dans cette eloquence, l'unite, la composition, l'ordre clair,
lumineux et beau sont, en effet, les qualites essentielles et le fond de
l'art. De la la grande fortune du _Discours sur le style_. Les lecons
qu'il donne ne sont pas a
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