_quelques idees
sur le style_ les plus cheres a l'auteur et les plus importantes a ses
yeux. Il devait n'etre, pour parler le langage des savants, qu'une
contribution a l'etude de l'art d'ecrire. C'est ce qu'il est, avec un
merite superieur.
Il faut retenir de cette remarquable dissertation comme des verites
indiscutables, d'abord l'importance du plan et de l'ordre dans les
ouvrages de l'esprit;--ensuite cette belle et profonde pensee que
l'auteur qui met de l'unite dans son ouvrage ne fait qu'imiter la nature
et l'ordre eternel qu'elle suit dans ses oeuvres;--enfin l'idee de
Buffon, sur l'importance du style, et sur ce que le style _est l'homme,
meme_ ce qui ne veut nullement dire, comme on le croit trop souvent, que
le style est une peinture du _caractere, des moeurs_ et de la _facon
de sentir_ de l'auteur (rien n'est plus eloigne que cela de la pensee de
Buffon ni n'y est plus contraire); mais ce qui veut dire que le style
c'est _l'intelligence_ de l'auteur, la marque de son _esprit_, et par
consequent ce qui lui appartient en propre dans quelque ouvrage que ce
soit.
Voila les parties solides et durables de ce morceau. Il ne faut pas
croire qu'il revele les veritables sources du grand style; il n'en
montre qu'une partie. Oui, dans quelque ouvrage que ce soit, le plan,
l'ordre, l'unite, sont absolument necessaires. Mais Buffon croit que de
la naissent _toutes_ les qualites du style, et cela n'est pas vrai. De
la naissent la clarte, la precision, l'aisance, la vivacite meme et
un certain mouvement, et un caractere grave, imposant, qui recommande
l'oeuvre et fait une forte impression sur l'esprit des hommes. Mais il
y a d'autres qualites du style qui tiennent au _sentiment_ et a
l'imagination. Il semble, vraiment, que Buffon n'ait omis, parlant
de l'art d'ecrire, que ces deux sources du genie: imagination et
sensibilite; et ce qui fait le style des poetes, des grands romanciers,
des auteurs dramatiques, des philosophes souvent, des orateurs presque
toujours, il semble que Buffon l'ait oublie.
Il ne l'a point oublie; la verite est qu'il s'en defie. La preuve
c'est que sentiment, imagination, couleur, il en a parle, seulement en
essayant d'abord de les faire provenir, non de leur source naturelle qui
est le mouvement du coeur, mais de la raison, de l'ordre mis dans les
idees, du plan;--ensuite en recommandant a plusieurs reprises de les
tenir en grande suspicion et comme en respect. Il faut relire le passage
ou il
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