st qu'apres trois actes qu'il mettra Merope dans
cette situation. Le reste sera incidents, meprises invraisemblables,
complication etrange, bizarre (et interessante du reste) de menus faits,
de peripeties et de coups de theatre qui supposent une combinaison bien
extraordinaire de circonstances et une bonne volonte un peu forte du
parterre.--La _convention_ propre au melodrame, c'est la naivete du
spectateur.
_Zaire_, c'est _Othello_ avec beaucoup de _Mithridate_; mais tirer de
la jalousie seule cinq actes de tragedie, pour Voltaire ce n'est pas du
theatre. Que Zaire ait perdu son frere, ait perdu son pere, et retrouve
son pere et retrouve son frere et qu'il y ait "reconnaissance" et qu'il
y ait "meprise"; voila du theatre! Pendant le temps que prennent ces
choses, on n'est pas force d'avoir du genie.
_Alzire_ c'est _Polyeucte_, un Polyeucte d'Ambigu. Que Polyeucte ait
epouse une fille recherchee autrefois par Severe, et que Severe revienne
tout-puissant, voila une "situation piquante", comme dit Voltaire. Mais
elle n'est pas assez piquante. Il y faut plus de complication. Supposez
que Polyeucte ait un pere qui a ete sauve jadis par Severe. Supposez que
Severe ait ete persecute par Polyeucte. Supposez que Polyeucte ignore
que son pere a ete sauve jadis par Severe. Supposez que Severe ignore
que Polyeucte est le fils de l'homme qu'il a sauve. Vous avez le point
de depart d'_Alzire_ et vous voyez combien de meprises et de brusques
revelations et de beaux coups de theatre vous pouvez attendre.--Quant a
Pauline entre Polyeucte et Severe, c'est chose moins importante et qui
pourra etre considerablement abregee, et qui le sera; n'en faites aucun
doute. Par exemple, Alzire demandera a Guzman la grace de Zamore,
c'est-a-dire a l'homme qui l'aime la grace de l'homme qu'elle aime. Main
elle n'osera pas le faire longuement. Trois phrases, une reticence, et
c'est fini. Et quand elle se retrouve avec sa confidente, elle dira:
"J'assassinais Zamore en demandant sa vie!" Mais voila precisement la
scene qu'il fallait faire! Elle est contenue dans ce vers. Il fallait
tout un long combat ou Alzire, s'avancant, reculant, revenant par
detours, tirant parti de l'amour qu'elle inspire en tremblant de reveler
celui qu'elle ressent, compromettant Zamore en le defendant trop, et
vite, quand elle s'en apercoit, se faisant douce a Guzman pour regagner
le terrain perdu; laissant voir au spectateur ses sentiments vrais sous
les evolutions tantot
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