de moi le gendarme au bandeau noir
et sa vue m'exasperait: il faisait craquer les batteries de son fusil
les unes apres les autres.
Le pretre arriva; M. de Solignac alla au-devant de lui et le conduisit a
la prison en faisant signe au gendarme de le suivre.
Dix minutes, un quart d'heure peut-etre s'ecoulerent; puis tout a coup
deux detonations retentirent dans la cour de la mairie, dominant le
tapage de la foule; puis, apres quelques secondes, ces deux detonations
furent suivies d'une autre moins forte: le coup de grace donne avec un
pistolet.
Et M. de Solignac, suivi de son gendarme, rentra dans la salle.
XXXVII
Il se dirigea vers moi, je me retournai pour l'eviter, mais il
m'interpella directement, et je fus oblige de m'arreter.
Cependant je n'osai lever les yeux sur lui, il me faisait horreur, et
j'avais peur de me laisser emporter par mon indignation.
--Capitaine, dit-il, dans une heure vous vous dirigerez sur
Entrecastaux, ou vous attendrez des ordres; le village est important,
vous pourrez loger votre detachement chez l'habitant; vous veillerez a
ce que vos hommes soient bien soignes, la journee de demain sera rude.
Cependant j'espere que l'exemple que nous venons de faire aura facilite
notre tache. A demain.
Puis, s'approchant de moi:
--Je regrette, dit-il a mi-voix, que notre discussion ait eu des
temoins, mais j'espere qu'ils ne parleront point.
--Et moi j'espere qu'ils parleront.
--Alors comme vous voudrez.
Et il sortit sans se retourner, suivi de son muet compagnon qui marchait
sur ses talons, et du gendarme qui venait a cinq ou six pas derriere
eux, le fusil a la main, horriblement pale sous son bandeau noir.
Les trois coups de feu qui avaient retenti avaient brise les liens qui
me retenaient, le voile qui m'enveloppait de ses ombres s'etait dechire,
je voyais mon devoir.
Peu de temps apres que M. de Solignac eut disparu, je quittai la salle
de la mairie, ou j'etais reste seul.
Le cadavre du malheureux bucheron etait etendu dans la cour, au pied du
mur contre lequel il avait ete fusille. Pres de lui, le pretre qu'on
avait ete chercher etait agenouille et priait.
Au bruit que firent mes eperons sur les dalles sonores, il releva la
tete et me regarda.
Je m'approchai; le cadavre etait couche la face contre terre; on ne
voyait pas comment il avait ete frappe; une seule blessure etait
apparente, celle qui avait ete faite par le pistolet. Le coup avait ete
tire a bout p
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