ur de nous, je ne voyais que confusion et
contradiction.
Apres avoir longuement tourne et retourne les difficultes de cette
situation sans percer l'obscurite qui l'enveloppait, j'en arrivai comme
toujours, en pareilles circonstances, a m'en remettre au temps et
au hasard pour l'eclairer. Le jour etait sombre, il n'y avait qu'a
attendre, le soleil se leverait et me montrerait ce que je ne savais pas
trouver dans l'ombre. Et en attendant, sans me tourmenter et m'epuiser
a la recherche de l'impossible, je ferais mieux de jouir de l'heure
presente en ne lui demandant que les seules satisfactions qu'elle
pouvait donner.
Il avait ete convenu avec Clotilde que, pour m'adoucir une premiere
visite a l'hotel Solignac, je ne la ferais pas le mercredi, jour de
reception, ou j'etais presque certain de rencontrer M. de Solignac, mais
le vendredi, a un moment ou il n'etait jamais chez lui. J'etais cense
ignorer que le mercredi etait le jour ou on le trouvait. J'arrivais de
Cassis apportant des nouvelles du general, rien n'etait plus naturel
que cette premiere visite. Pour les autres, nous verrions et nous
arrangerions les choses a l'avance.
Le vendredi, apres son dejeuner, Clotilde descendit au jardin et vint
s'installer, un livre a la main, sous un marronnier en fleurs. Elle se
placa de maniere a tourner le dos a l'hotel et par consequent en me
faisant face. Je ne sais si le livre pose sur ses genoux etait bien
interessant, mais ce qu'il y a de certain, c'est qu'elle tint plus
souvent ses yeux leves vers mes fenetres que baisses sur les feuillets
de ce livre.
Pendant deux heures, elle resta la; puis, avant de quitter cette
place, elle me fit un signe pour me dire qu'elle rentrait chez elle et
m'attendait.
Cinq minutes apres, je laissais retomber le marteau de l'hotel Solignac,
et l'on m'introduisait dans un petit salon d'attente.
--Je ne sais si madame peut recevoir, dit le domestique, je vais le
faire demander.
Ce moment d'attente me permit de me remettre, car l'emotion m'etouffait.
Quelques minutes s'ecoulerent, et le domestique m'ouvrit la porte du
salon de reception: Clotilde, debout devant la cheminee, me tendait les
deux mains.
--Enfin, vous voila, dit-elle, apres m'avoir fait asseoir pres d'elle,
chez moi, et nous sommes ensemble, sans avoir a trembler ou a nous
cacher. Comme j'attendais ce moment avec impatience! Maintenant que nous
sommes reunis, rien ne nous separera plus. Mais, regardez-moi donc.
Et
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