t dix heures. A
neuf heures, je me presentai a l'hotel qu'il occupe au haut des
Champs-Elysees.
Non content d'etre devenu general et d'occuper deux ou trois fonctions
de cour qui lui font une riche position, Poirier, comme M. de Solignac
et comme beaucoup d'autres, a profite de sa situation pour faire des
affaires, et il y a bien peu d'entreprises dans lesquelles il n'ait la
main. Je trouvai dans le salon d'attente cinq ou six speculateurs
que j'avais l'habitude de voir chez M. de Solignac. Je crus qu'il me
faudrait attendre et ne passer qu'apres eux, mais quand j'eus donne mon
nom, on me fit entrer aussitot dans le cabinet du general.
En veston du matin, Poirier etait assis dans un fauteuil, et trois
enfants, dont l'aine n'avait pas cinq ans, jouaient autour de lui, l'un
lui grimpant aux jambes, les autres se roulant sur le tapis.
--Pardonnez-moi de ne pas me lever, me dit-il, mais je ne veux pas
deranger M. Number one.
Et comme je le regardais:
--Vous cherchez M. Number one, dit-il en riant. J'ai l'honneur de vous
le presenter; le voici, c'est mon fils aine. Maintenant, voici miss
Number two, ma fille; puis Number three, mon second fils; quant a miss
Number four, elle dort avec sa nourrice. Je me perdais dans les noms de
mes enfants; j'ai trouve plus commode de les designer par un numero. Je
sais d'avance comment ils s'appelleront, car Number four n'est pas le
dernier. Un enfant tous les ans, mon cher, il n'y a que cela pour qu'une
femme vous laisse tranquillite et liberte; elle s'occupe de sa famille,
elle se soigne elle-meme et elle ne peut pas faire de reproches a un
mari aussi... bon mari. Quant a doter ou a caser tout ce petit monde,
la France y pourvoira. Je vous recommande mon exemple et je vous assure
qu'il est bon a suivre. Venez-vous m'annoncer votre mariage?
--Je viens vous demander si vous pouvez me faire admettre dans l'armee
americaine avec mon grade de capitaine?
--Vous voulez quitter Paris, vous, maintenant?
--Je suis arrive a un age ou il faut absolument que je me fasse une
position, et je viens vous prier de m'y aider.
--Vous voulez une position et vous voulez en meme temps quitter la
France! pardonnez ma surprise, mais ce que vous me dites la est
tellement extraordinaire pour quelqu'un qui vous connait et qui vous
a suivi comme moi, que vous ne vous facherez pas, je l'espere, de mes
exclamations.
--Nullement; vous avez le droit d'etre surpris d'une determination qui
ne peut pa
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