je le craignais.
--Qu'a dit Horton?
--Hier soir, il n'a rien dit, si ce n'est que l'etat etait fort grave.
Cependant M. de Solignac a bientot repris sa pleine connaissance. Ce
matin, M. Horton, qui vient de partir, a ete plus precis. M. de Solignac
avait ete frappe par une congestion au cerveau, ce qui avait amene son
evanouissement.
--Est-ce une attaque d'apoplexie?
--Je ne sais; Horton n'en a point parle. Il regarde cette congestion
comme une menace serieuse....
Elle s'arreta. Je la regardai pour lire dans ses yeux le mot qu'elle
n'avait pas prononce, mais elle tenait ses paupieres baissees et je ne
pus pas deviner sa pensee. Comme elle ne continuait pas, je n'eus pas la
patience d'attendre.
--Ce danger est-il imminent? dis-je a voix basse.
--Il pourrait le devenir, m'a dit Horton, si M. de Solignac ne reste
pas dans un calme absolu et surtout s'il a conscience de son etat et du
danger qui le menace; une emotion vive peut le tuer.
--Et qui lui donnera cette emotion? vous pouvez, il me semble, faire ce
calme autour de lui.
--Moi, oui, et je le ferai assurement; mais le trouble peut venir du
dehors.
--Vous etes maitresse chez vous, vous pouvez fermer votre porte.
--Pas devant tout le monde. Ainsi vous savez qu'il est d'usage que
l'empereur vienne dire adieu a ses amis mourants. Je ne pourrai pas
fermer ma porte, comme vous m'en donnez le conseil, si l'empereur se
presente.
--Il n'y a qu'a lui ecrire quelle est la situation de M. de Solignac, et
il ne viendra pas hater sa mort par une visite imprudente. Il me semble,
d'ailleurs, qu'il ne doit pas plus aimer a faire ces visites qu'on
n'aime a les recevoir.
--J'ai pense a ecrire cette lettre, mais j'ai ete retenue par un danger
qui surgit d'un autre cote. Vous savez que M. de Solignac a entre
les mains des papiers importants qui interessent un grand nombre de
personnages. Si on apprend aux Tuileries que M. de Solignac peut mourir,
on voudra avoir ces papiers; si ce n'est pas l'empereur lui-meme qui
vient les chercher, ce sera quelqu'un qui parlera en son nom et que je
ne pourrai pas repousser.
--En effet, la situation est difficile. Que comptez-vous faire?
--Cacher la maladie de M. de Solignac. Si on ne sait pas qu'il est
malade, on ne s'inquietera pas de lui, on ne voudra pas le voir et il se
rassurera. Deja, depuis ce matin, il a demande plusieurs fois le nom de
ceux qui s'etaient presentes pour prendre des nouvelles de sa sante. Il
m
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