evant de moi pour
me prevenir que nous devions nous arreter dans sa commune, afin de
concerter notre mouvement avec les troupes qui occupaient les communes
environnantes; les differentes bandes s'etaient reunies en un seul
corps, et apres s'etre successivement emparees de Luc, de Vidauban, de
Lorgues et de Salernes, elles marchaient sur Draguignan. Le moment etait
venu de les attaquer; les troupes se concentraient; ordre etait donne
d'arreter les divers detachements de maniere a agir avec ensemble, et il
me communiqua cet ordre, qui etait signe "de Solignac."
De Solignac! Je regardai attentivement la signature; mais l'erreur
n'etait pas possible, les lettres etaient formees avec une nettete
remarquable.
Quel pouvait etre ce Solignac? J'interrogeai le maire pour savoir quel
etait le prefet du departement; il me repondit qu'il y en avait deux: un
ancien, M. de Romand, un nouveau, M. Pastoureau.
--Et ce M. de Solignac?
--Je ne sais pas; je crois que c'est un commissaire extraordinaire; au
reste, vous allez le voir bientot; il a passe par ici il y a deux heures
avec une escorte de gendarmes, et il doit revenir.
Il n'y avait qu'a attendre; j'ordonnai la halte, et je fis reposer mes
hommes et mes chevaux.
Ce Solignac etait-il l'ami du general Martory? Cela etait bien probable;
le signalement que me donnait le maire se rapportait a mon personnage,
et le devouement de celui-ci a la cause napoleonienne avait du en
faire un commissaire extraordinaire dans un departement insurge; cela
convenait au role qu'il jouait depuis six mois dans le Midi et le
completait; il n'avait point de position officielle, afin de pouvoir en
prendre une officieuse partout ou besoin serait.
Comme j'agitais ces questions avec un certain effroi, car il ne me
convenait point d'etre place sous la direction de M. de Solignac,--au
moins du Solignac que je connaissais fanatique et implacable,--on
m'amena un paysan qu'on venait d'arreter.
La foule l'accompagnait en vociferant, et ce n'etait pas trop de six
soldats pour le proteger; on criait: "A mort!" et on lui jetait des
pierres.
C'etait un vieux bucheron aux traits fatigues, mais a l'attitude calme
et resolue; il etait vetu d'une blouse bleue, et l'un de mes soldats
portait un mauvais sabre rouille qu'on avait saisi sur lui.
Je demandai quel etait son crime; on me repondit qu'on l'avait arrete au
moment ou il se sauvait pour rejoindre les insurges.
La foule l'avait suivi et nous ento
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