reneaux du donjon!
--Diable! Tu veux faire pendre un connetable?
--Ca! devenez-vous fou... ou bien ai-je le delire?... Pardaillan
connetable?...
--Oui. Toi, tu veux le pendre. Et le roi le fait chercher pour le creer
connetable. Parce que, si le roi est vivant, si le roi est encore roi,
c'est a Pardaillan qu'il le doit! Parce que c'est Pardaillan qui a tue
le duc de Guise!...
Cependant, Pardaillan, suivi de Fausta, s'etait lance vers la porte de
la ville qu'il franchit sans obstacle, et avait enfile le pont de la
Loire.
Fausta ne vivait plus qu'en lui, elle transposait en lui sa vie... Et sa
voix parut apre, violente, amere, et douce, lorsque, s'arretant tout a
coup, elle prononca:
--Avant d'aller plus loin, chevalier, ecoutez-moi.
Pardaillan s'arreta. Ils etaient au milieu du pont. Devant eux, de
l'autre cote de la Loire, c'etait l'espace libre.
--Mais, madame, dit Pardaillan, il me semble que nous devons piquer au
contraire. On peut nous poursuivre...
--Il faut que je parle avant d'aller plus loin, dit Fausta.
Elle baissa la tete. Sans doute l'instant etait supreme pour elle, car
Pardaillan la vit frissonner. Tout a coup, cette tete pale, si belle,
si orgueilleuse, et, en ce moment, pleine d'une sorte de serenite
majestueuse, se redressa, et ses yeux noirs se fixerent sur les yeux de
Pardaillan.
--Chevalier, dit-elle, vous aviez prepare, m'avez-vous dit, deux chevaux
pour ma fuite?...
--Oui, madame. Et ils vous attendent. Mais ils sont inutiles. Je les
garderai donc pour moi.
--Un de ces deux chevaux... reprit Fausta, il y en avait un pour moi,
n'est-ce pas?
--Certes, madame.
--Et l'autre? dit Fausta avec un etrange fremissement. L'autre, pour qui
etait-il, selon vos previsions?...
--Mais, dit Pardaillan, pour un de vos serviteurs... je vous l'ai dit.
--Ainsi, reprit lentement Fausta, ce cheval n'etait pas pour vous?...
Pardaillan tressaillit et regarda fixement Fausta. Une minute, leurs
regards se croiserent. Fausta etait pale comme la mort.
--Monsieur, dit-elle, plus ne m'est rien, rien ne m'est plus. Je ne suis
vivante qu'en vous. M'acceptez-vous telle que je suis dans votre pensee,
dans votre coeur, dans votre vie?... Telle que je suis: criminelle,
peut-etre, hideuse, sans doute, capable surement d'inspirer l'effroi
et l'horreur par mes actes, car mes actes viennent de pensees
incomprehensibles. Telle que je suis... Un mot: m'acceptez-vous? Je vis!
Vous ecartez-vous de
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