erable auberge
qui, placee au carrefour, s'appelait l'auberge des Quatre-Chemins.
L'aubergiste, interroge, prit un air tres etonne et repondit hardiment
qu'il n'avait vu passer aucun cavalier.
Le chevalier sentit une sorte d'accablement s'emparer de lui. Il ne
dit rien, pourtant, et, s'etant occupe de faire donner des soins a son
cheval, s'assit pres du feu et commanda qu'on lui servit a manger. La
nuit venait, le temps etait triste. Pardaillan resolut de passer la nuit
dans cette auberge... Tout en mangeant, il examinait du coin de l'oeil
l'aubergiste, et se disait:
"Quelle figure de truand est-ce la?..."
En effet, l'homme avait fort mauvaise mine. De plus, il y avait deux
garcons dans l'auberge, luxe insolite pour ce malheureux bouchon perdu
en pleine campagne. Et ces deux hommes avaient, eux aussi, de ces
physionomies louches, qui inspirent tout de suite au voyageur la pensee
d'aller coucher ailleurs... Lorsqu'il eut fini de manger, Pardaillan
s'accouda a la table, les bottes au feu. L'aubergiste placa sur la table
une chandelle fumeuse, et se retira.
Pardaillan vit qu'il etait seul. Il etait las. Sa pensee si vivante
d'ordinaire, et si methodique, devenait lourde. Peu a peu, il
s'assoupissait. Et, comme il faisait un effort pour garder les yeux
ouverts, son regard, tout a coup, tomba sur un fragment de miroir
accroche devant lui.
Ce miroir reflechissait la salle vaguement eclairee par le feu mourant
et par la chandelle. Comme il allait refermer les yeux, il vit dans le
miroir s'entrouvrir doucement la porte du fond de la salle.
La porte s'etait ouverte sans bruit. Il sembla a Pardaillan qu'il
apercevait alors la figure louche de l'aubergiste, dont les yeux de
braise etaient fixes sur lui. Pardaillan s'immobilisa, le coude sur
la table, la tete sur la main. Pendant une longue minute, il eut la
sensation de ces yeux fixes sur lui par derriere.
Tout a coup, il vit que l'aubergiste se mettait en mouvement. Il devait
etre pieds nus, car le chevalier n'entendit pas le moindre bruit. Et
voici que, derriere le maitre de l'auberge, apparurent les deux garcons,
autres ombres silencieuses, sournoises. Et Pardaillan entendit ceci:
--Il dort... c'est le moment...
Pardaillan vit les trois ombres se glisser vers lui, et, a cet instant,
il lui sembla que quelque chose comme un couteau ou un poignard venait
de jeter une lueur soudaine, et que le bras de l'aubergiste se levait.
"Je crois en effet que c'est le mo
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