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avait les pieds lies, mais les mains libres... J'attendais... A force
d'attendre... et puis la physionomie livide de cet homme finissait
par me faire mal... a force d'attendre, donc, j'ai voulu voir si vous
arriviez. Je tenais mon poignard a la main. Je le deposai machinalement
sur cette table... Je me levai, j'allai jusqu'a la porte... a peine y
restai-je quelques instants...
--Oui, fit Pardaillan, j'aurai du prevoir qu'un homme qui veut se sauver
guette avec plus d'ardeur et de patience que l'homme qui garde... Il a
pris le poignard et a coupe ses liens, n'est-ce pas?...
--Oui!.., Au moment ou je me retournais pour rentrer, j'ai recu sur
la tete un coup violent, et une poussee m'a envoye rouler dans la
poussiere... Quand je me suis releve, j'ai vu Maurevert qui sautait sur
l'un des chevaux et partait ventre a terre...
--C'est bien, dit Pardaillan. Nous devions retourner ensemble a Paris,
retournez-y seul. Je vous y reverrai.
--Vous courez a sa poursuite?
--Parbleu!... fit Pardaillan en detachant et en enfourchant le cheval
restant; quelle direction a-t-il prise?
--Il s'est elance vers Beaugency... Ou vous retrouverai-je?...
--Au couvent des Jacobins, si vous voulez. Adieu!
--Un dernier mot, fit Jacques Clement, dont la sombre figure s'illumina
d'un eclair. Suis-je libre, maintenant?...
--Libre de quoi?...
--De tuer Valois!..."
Pardaillan frissonna. Il demeura un instant pensif, puis murmura:
--Accomplissez donc votre destinee, puisqu'il le fau!...
Pardaillan piqua des deux et se lanca dans un galop effrene.
A deux lieues de la, il rencontra un paysan qui conduisait une
charrette. Pardaillan interrogea le paysan en lui faisant une
description exacte de Maurevert et de son costume. Le paysan lui montra
a cent pas en avant une route qui s'eloignait perpendiculairement a la
Loire.
--J'ai rencontre le cavalier que vous dites sur cette route que je
viens de quitter, dit-il. Cette route s'enfonce de cinq lieues dans les
terres, puis tourne a droite, et conduit a Tours...
Pardaillan jeta une piece d'argent au paysan, alla rejoindre la route
qui venait de lui etre signalee et reprit son allure de galop furieux.
Bientot le chevalier dut moderer son allure, sous peine de crever son
cheval. Lorsqu'il atteignit le croisement des routes signale par le
paysan, la pauvre bete etait deja bien fatiguee par un temps de galop
d'environ six heures.
Pardaillan mit donc pied a terre, devant une mis
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