nse a aller
trouver moi-meme le Bearnais? Mais s'il me refuse... le refus atteindra
le roi, car je suis au roi!
--J'irais, moi, si cela peut vous plaire. Vous m'avez rendu service en
me faisant accorder l'hospitalite par Ruggieri: mon tour est venu.
--Oh! vous etes en avance, et je vous dois plus que vous ne me devez,
dit Crillon. Mais, enfin, si vous consentiez...
--Je m'en charge, dit Pardaillan avec fermete. Les propositions
viendront du Bearnais a Valois...
--Mortboeuf! Si vous faisiez une chose pareille!... Le roi serait
sauve!...
--Vous croyez? fit Pardaillan avec un etrange sourire. J'y vais de ce
pas. A une condition, pourtant: c'est que vous n'en parlerez pas au roi.
Je me charge de mettre les deux Majestes en presence, voila tout.
Dans la meme journee, Pardaillan atteignit le camp du Bearnais qui,
n'ayant pu entrer dans Saumur, s'etait avance dans la direction de
Tours, pour surveiller de plus pres les evenements. Comme il approchait
du camp, il vit deux officiers subalternes a tenue toute rapee et
rapiecee qui, venant sans doute de pousser une reconnaissance,
regagnaient leurs tentes au pas de leurs chevaux.
L'un d'eux, surtout, paraissait plus minable; il n'avait pas d'armure
comme son compagnon; sa jaquette etait trouee aux coudes; le pourpoint
etait use aux epaules, sans doute par l'usage de la cuirasse; il portait
un haut-de-chausses de velours feuille-morte, aussi use que le reste du
costume; seulement, deux details apparaissaient dans cet ensemble
et tranchaient sur le reste: ce cavalier portait, en effet, sur les
epaules, un grand manteau ecarlate, et, sur la tete, un chapeau gris a
panache blanc.
L'autre cavalier portait sur la cuirasse une echarpe blanche, mais
n'avait pas de panache a son casque.
Pardaillan s'etait approche de ces deux officiers dans l'intention de
leur demander le moyen de penetrer dans le camp et de voir le roi de
Bearn. Ils continuaient leur chemin sans faire attention a lui et
causaient vivement entre eux avec cet accent pimente qui ferait
reconnaitre un Gascon au milieu d'une armee.
--Messieurs, dit le chevalier en mettant sa monture a hauteur des deux
hommes et en soulevant son chapeau, je desirerais penetrer dans le camp.
Le cavalier au panache se retourna vers Pardaillan, qui le reconnut
alors...
"Le roi de Bearn!" murmura-t-il en lui-meme.
Le futur Henri IV jeta sur Pardaillan un regard plus ruse que profond.
--Pourquoi voulez-vous entrer au
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