-Madame, dit Maurevert, je sais le jour et l'heure et comment la chose
doit se faire.
Catherine eut un tremblement d'emotion.
--Parlez, dit-elle, devorant du regard celui qui portait une telle
nouvelle.
--Avant tout, fit Maurevert, je prierai Votre Majeste de faire sortir de
Blois des cet instant meme un officier quelconque qui devra monter le
cheval que j'ai laisse dans la cour carree et se couvrir de ce manteau.
Il est essentiel pour moi que cet homme, quel qu'il soit, parte bientot.
--Larchant! appela la reine.
Le capitaine entra, tandis que Maurevert se rejetait dans un coin
d'ombre.
--Larchant, dit Catherine, j'apprends qu'il y a des rassemblements de
huguenots du cote de Tours. Envoyez a l'instant meme quelqu'un de sur
pour voir ce qu'il en est et surveiller le pays une bonne huitaine.
Votre messager trouvera un cheval tout selle dans la cour carree... et
voici un manteau pour lui... Que dans cinq minutes il soit parti.
Larchant prit le manteau jete sur un fauteuil et sortit passivement,
sans un mot.
--Maintenant, reprit Maurevert, maintenant que je sors de Blois et
que je fuis, il faut que Votre Majeste m'assure pour quelques jours
l'hospitalite dans le chateau.
--Ruggieri! appela la reine, decidee a donner entiere satisfaction a
Maurevert.
Une minute s'ecoula, et deja Catherine froncait le sourcil, lorsque
l'astrologue parut en disant:
--On vient de m'eveiller, et j'accours. Majeste.
--Ruggieri, ou es-tu loge?
--Mais, fit l'astrologue etonne, dans les combles, c'est-a-dire le plus
loin possible de la terre et le plus pres possible des etoiles.
--Es-tu souvent espionne la-haut?
Ruggieri sourit:
--Nul n'y vient qu'en tremblant; nul n'y vient s'il n'y est force.
Vous savez que je passe pour un esprit malfaisant, capable de jeter un
mauvais sort.
--En effet, dit Catherine. Mon bon Ruggieri, tu cacheras ce gentilhomme
dans tes appartements et il y sera mieux a l'abri de la curiosite que
dans l'appartement du roi...
Ruggieri fit un signe pour dire qu'il avait compris. A ce moment la
reine palit et s'affaissa dans un fauteuil. Ses yeux se revulserent. Un
tremblement mortel agita ses mains. Ruggieri s'elanca vers elle, sortit
vivement un flacon de son aumoniere et laissa tomber quelques gouttes de
son contenu sur les levres de Catherine. Bientot celle-ci respira plus
librement.
--Tu vois! fit-elle avec un morne desespoir, c'est la fin qui
approche... Ruggieri, est-ce que je
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