ans ses Oraisons funebres, et la "sublimite" de ces beaux ouvrages en
est "deparee"[70]. Comparez le portrait si correct et bien compasse de
la reine d'Egypte dans le _Sethos_ de l'abbe Terrasson et le portrait de
Marie-Therese dans Bossuet: "vous serez etonne de voir combien le grand
maitre de l'eloquence est alors au-dessous de l'abbe Terrasson[71]." La
Fontaine est charmant; il a un "instinct heureux et singulier" et
fait ses fables "comme l'abeille la cire"; mais que de trivialites
quelquefois, que de "bassesses", que de "negligences" et que
d'"improprietes"! Surtout il est regrettable qu'il n'ait "ni rime ni
_mesure_".--Il n'y a pas jusqu'a ce bon Rollin qui n'ait donne dans
le familier. Dans un passage sur les jeux scolaires, il ose nommer
la "balle", le "ballon" et le "sabot"; et ce sabot ne saurait se
souffrir.--Sait-on bien que Racine lui-meme n'est pas constamment
elegant? Il y a dans le second acte d'_Andromaque_ des "traits de
comique" qui sont absolument insupportables dans une tragedie. Ah! quel
dommage!
[Note 70: _Temple du gout_.]
[Note 71: _Connaissance des beautes et des defauts de la poesie et
de l'eloquence dans la Langue francaise.--Caracteres et portraits_.]
Voltaire n'a pas cesse d'avoir de ces singulieres delicatesses et de ces
etranges degouts. En litterature aussi c'est un gentilhomme, certes,
mais trop recemment anobli, et il est plus intraitable qu'un autre sur
la noblesse.
Avec sa vive sensibilite, je voudrais pouvoir dire "nervosite" d'homme
de theatre, il a recu comme le coup et la secousse de Shakspeare,
pendant son sejour en Angleterre, et il a crie en France la gloire du
grand tragique.--Pourquoi cette croisade furieuse, tout a la fin de
sa carriere, contre l'auteur d'_Othello_? C'est qu'on est l'auteur de
_Zaire_, sans doute; c'est aussi que le gout intime reprend le dessus;
et que le gout intime consiste dans les qualites de forme infiniment
preferees au fond. Le gout de Voltaire c'est le gout de Boileau devenu
beaucoup plus etroit et beaucoup plus timide et beaucoup plus superbe.
Prenez ce qui est comme l'enveloppe de la poetique du XVIIe siecle:
trois unites, distinction rigoureuse des genres, noblesse de ton,
merveilleux, eloquence continue, toutes choses qui sont des _effets_ de
la conception artistique du grand siecle, et non cette conception meme;
et cette sorte d'enveloppe et d'ecorce, desormais sans substance et sans
seve, prenez-la pour l'art lui-meme; ayez cette illu
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