t la premiere est celle que
l'existence du livre donnait pour resolue dans l'esprit de
l'auteur: _Qu'il faut fonder la foi sur des raisons humaines, et le
contraire_[178]. Si Abelard n'eut pas ete decide pour l'affirmative,
aurait-il jamais ecrit son ouvrage?
[Note 178: "Quod tides humanis rationibus sit adstruenda, et contra."
(I, p. 17.) C'est a peu pres la question de saint Thomas: "Utrum sacra
doctrina sit argumentativa." (_Summ. Theol._, pars I, qu. i, a. 8.)]
La collection de passages qu'il a places ici en regard les uns des
autres est encore precieuse aujourd'hui; elle atteste une lecture assez
considerable et plus d'instruction qu'on ne croirait dans les
lettres sacrees. Elle serait utile comme specimen du catalogue de la
bibliotheque ecclesiastique des savants de Paris au XIIe siecle, quoique
je soupconne que plusieurs passages sont pris dans les auteurs, non qui
les ont ecrits, mais qui les ont cites, et notamment dans saint Jerome
et saint Augustin[179].
[Note 179: Voici la liste par ordre chronologique des auteurs chretiens
cites dans le _Sic et Non_: Origene, Cyprien, Eusebe, Hilaire, Prudence,
Athanase, Ephrem, Ambroise, Jean Chrysostome, Jerome, Augustin, Leon,
pape, Prosper, Maxime, eveque de Turin, Gennade, pretre de Marseille qui
Ecrivait vers la fin du Ve siecle, Hormisdas, pape, Boece, Gregoire le
Grand, Isidore de Seville, Bede, Ambroise Autpert, abbe de Saint-Vincent
pres Benevent, auteur au VIIIe siecle d'un commentaire sur l'Apocalypse,
Haimon, eveque d'Halberstadt en 841, et qui a commente les Ecritures et
redige un abrege de l'histoire de l'Eglise, Nicolas Ier, pape, et Remi,
moine de Saint-Germain l'Auxerrois, qui enseignait la dialectique a
Paris au commencement du Xe siecle, et qui a commente les psaumes.
On peut soupconner que ce qui est cite des Peres grecs, notamment
d'Origene, de saint Ephrem, et de saint Jean Chrysostome, vient de
seconde main. Abelard pouvait avoir une traduction d'Eusebe, et quant a
saint Athanase, il ne cite, je crois, que le Symbole, et un traite de la
Trinite, qui n'existe qu'en latin, et qui lui a ete faussement attribue.
(S. Athan. Op., _de Trin. lib._, VIII, t. II, p. 602, Paris, 1699.) Il y
a aussi quelques rares citations des paiens, savoir Aristote, Ciceron,
Seneque et Macrobe.]
Cet ouvrage fut apparemment une des premieres compositions theologiques
d'Abelard; il doit etre anterieur au concile de Soissons, et sans doute
il l'ecrivit ou le commenca a l
|