ue le bien, a Dieu surtout, aux
bienheureux, qui ne peuvent pecher: plus on est eloigne du mal, plus
on est libre dans le jugement qui choisit le bien; le peche est un
esclavage. D'une maniere generale, reconnaissons le libre arbitre a qui
peut accomplir volontairement et sans contrainte ce qu'il a resolu dans
sa raison: Dieu est donc libre.
[Note 247: Cette definition est de Boece.--_De Interp., edit. sec._,
I. III, p. 360 et 375.--_In Topic. Cic._, I. V, p. 840.--_De Consol.
phil._, I. V, p. 939.--Voyez ci-dessus, I. II, c. iv, t. I, p. 405.]
[Note 248: Voyez la Dialectique, part. II, p. 260-291, et ci-dessus le
c. iv du t. I. Les idees d'Abelard sur la liberte, ses definitions, ses
preuves sont en tres-grande partie empruntees de Boece. (_De Interp.,
ed. sec._, I. III, p. 360, 368, 372.)]
Quant a lui, rien n'advient par hasard, sa providence ayant tout
precede, le hasard n'est que l'incertitude humaine. La nature n'a de
mysteres que pour notre science. On ne dit les miracles impossibles que
si l'on regarde au cours ordinaire de la nature, aux causes primordiales
des choses, et non a la souverainete divine. Si Dieu formait encore
aujourd'hui l'homme du limon, et la femme de la cote de l'homme, ce
serait contre la nature, au-dessus de la nature, c'est-a-dire que les
causes primordiales y paraitraient insuffisantes; il faudrait que Dieu
imprimat extraordinairement aux choses une force particuliere[249].
Evidemment les recherches des philosophes n'atteignent que les creatures
et l'ordre journalier, toutes leurs lois sont au-dessous on en dehors de
la toute-puissance; la possibilite et l'impossibilite sont relatives aux
facultes des creatures, et en particulier la regle de la possibilite
de l'antecedent liee a celle du consequent, ne peut s'appliquer qu'aux
choses creees.
[Note 249: Cf. _Hexameron. Thesaur. nov. anecd._, t. V, p. 1375.]
C'est ainsi, dit Abelard, que nous viderons cette _ancienne querelle_
dont parle la philosophie, cette question de la prescience divine, cette
question de savoir s'il ne resulte pas de l'immutabilite de Dieu que
tout arrive necessairement. Les philosophes, et notamment Aristote, "si
habile dans le raisonnement, qu'il a merite d'etre appele le prince des
peripateticiens, c'est-a-dire des dialecticiens, nous fourniront de quoi
refuter les pseudo-philosophes." Ceux-ci disent, pour troubler la
foi des simples, que non-seulement le bien, mais le mal arrive
necessairement, et qu'ainsi
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