raient se distinguer
par les attributs de leur essence commune. Il faut donc qu'elles aient
chacune une ou plusieurs proprietes personnelles, ou distinctives de
chaque personne. Cette propriete, c'est au moins pour l'une d'etre
le Pere, pour l'autre le Fils, pour la troisieme le Saint-Esprit. Le
caractere distinctif de chaque personne ne serait-il que son nom? Tout
se reduirait-il a une denomination, non a une designation? Ce parti
incontestablement orthodoxe n'est pourtant pas celui que prend l'Eglise.
La regle est de croire le Pere _inengendre_, le Fils _seul engendre_,
le Saint-Esprit _procedant_. Chacun de ces attributs est distinctif,
exclusif; c'est un propre, _proprium_. Maintenant, peut-on ajouter que
cette distinction de personnes dans la Trinite correspond a une certaine
diversite, moins dans les attributs que dans les operations de la
Divinite? L'Eglise ne l'a pas interdit, et quelques textes permettent de
voir eminemment dans le Pere la puissance, dans le Fils la sagesse ou
l'intelligence, dans le Saint-Esprit la bonte ou l'amour. Le Symbole des
apotres nomme _le Pere tout-puissant_; le Fils seul est appele Verbe,
dit saint Augustin; le Saint-Esprit est l'amour, dit saint Gregoire.
C'est au Fils que saint Augustin attribue, _nuncupat_, l'intelligence ou
la sagesse, au Saint-Esprit l'amour et la bonte[310]. Cette repartition
des attributs divins, Bede, dont l'autorite etait si grande _dans la
latinite_, l'avait admise et propagee. Je conjecture que c'est de lui
surtout qu'Abelard l'avait empruntee. Pierre Lombard l'a plus tard
adoptee, et saint Thomas la justifie. Elle se rencontre dans bien des
livres a l'etat de lieu-commun[311]. La trouvant recue, Abelard a pu en
inferer qu'elle avait quelque realite, et qu'elle devait concorder
avec la distinction fondamentale de Pere, de Fils, de Saint-Esprit, de
non-generation, de generation, de procession. Substituant donc a ces
trois termes les trois autres, puissance, sagesse, bonte, il a conclu
que, comme on dit: le Fils est engendre du Pere, et le Saint-Esprit
procede du Pere et du Fils; on devait pouvoir dire: la sagesse est
engendree de la puissance, et la bonte procede de la puissance et de la
sagesse. Consequemment, la sagesse qui est engendree de la puissance,
est de la puissance; l'idee de generation conduit la. Car, en these
generale, on peut dire que la sagesse on l'intelligence est une
puissance, une faculte, celle de comprendre et de savoir. Quant a la
bon
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