itude sans egale; mais Augustin parle
autrement: _La foi_, dit-il, _n'est pas dans le coeur ou elle reside
et pour celui qui la possede comme une conjecture ou une opinion,
elle est une certaine science au cri de la conscience_. Loin donc,
bien loin de nous de reduire ainsi la foi chretienne. C'est pour les
Academiciens que sont ces _estimations_, gens dont le fait est de
douter de tout, de ne savoir rien; pour moi, je marche confiant dans
la sentence du maitre des nations, et je sais que je ne serai point
confondu. Elle me plait, je l'avoue, sa definition de la foi,
quoique cet homme dirige contre elle une accusation detournee: "_La
foi_, dit-il, _est la substance des choses qu'il faut esperer,
l'argument des choses non apparentes_ (Heb., xi, 1). La substance
des choses qu'il faut esperer, non la fantaisie de conjectures
enormes; tu l'entends, _la substance!_ Il ne t'est pas permis dans
la foi de penser ou de disputer a ton gre, ni de vaguer ca et la
dans le vide des opinions, dans les detours de l'erreur. Par le mot
de substance, quelque chose de certain et de fixe t'est d'avance
impose; tu es enferme dans des bornes certaines, tu es emprisonne
dans des limites certaines; car la foi n'est pas une estimation,
mais une certitude[351]."
[Note 351: _Ab. Op._ Bern., ep. xi, p. 283, 284.]
Il semble ici que saint Bernard ait rencontre juste, et une grande
autorite lui vient en aide, c'est Gerson[352]. Voila bien, ce semble,
le point de la discussion entre le philosophe et le fidele. Dans cette
diversite de definition de la foi eclate la difference entre celui qui
veut par la raison arriver a croire, et celui qui commence par croire et
qui raisonne apres. Cependant, si l'on consulte le texte, la critique
est hasardee. On se rappelle le debut de l'Introduction. A cote de la
foi, l'auteur place l'esperance, et afin d'expliquer pourquoi il confond
l'esperance dans la foi, il generalise la foi qui, comme l'esperance,
est une estimation ou un jugement de l'esprit sur les choses qu'on ne
voit pas. Cette definition de la foi est donc generale, et non speciale,
c'est celle de la foi abstraite, et non de la foi chretienne; c'est
un souvenir d'Aristote qui unit la croyance ou la foi a l'opinion ou
estimation. Mais des qu'il s'agit de la foi, "en tant qu'elle interesse
l'ensemble du salut de l'homme, objet de son ouvrage," Abelard revient
a la definition de s
|