se n'a pas toujours
soupconne la hardiesse, et qu'elle a de confiance admis ou laisses au
nombre de ses docteurs, quelquefois ranges au nombre de ses saints.
Plus tard, la tradition mieux fixee, la puissance ecclesiastique mieux
etablie, l'instruction et l'originalite philosophique en decadence,
rendent la theologie de plus en plus uniforme et convertissent les
ecrivains en de simples metteurs en oeuvre qui exposent et disposent,
prouvent et defendent, mais qui n'inventent plus. Seulement, par
quelques details, par le choix de certains arguments, par l'emploi de
certaines citations, par l'attachement a certaines autorites, enfin par
leur methode d'exposition, ils se donnent un caractere et manifestent
une tendance.
Facies non omnibus una,
Non diversa tamen.
Ils sont chretiens, mais dogmatiques, demonstratifs ou mystiques; et ils
poussent la science religieuse dans telle ou telle voie qui la conduit,
soit au quietisme intellectuel, qui n'enseigne ni ne discute, soit au
rationalisme chretien, si goute de nos peres, soit a l'absolutisme
de principe de l'autorite, exclusivement admis par une ecole de ce
temps-ci. Rarement ces differences importantes ont ete, du VIIe au
XVe siecle, poussees au point d'insinuer dans la foi des doctrines
inconnues, et les heresies meme n'ont presque jamais produit de
veritables nouveautes philosophiques. Dans toute cette longue periode,
il se produit peu d'hommes qui, tels que Scot Erigene, se soient fait
un christianisme personnel, et qui, ressuscitant quelque philosophie
payenne, l'aient couverte de la robe du levite pour qu'on ne la reconnut
pas. Ils ne sont pas plus communs ceux qui, comme saint Anselme, sans
sortir du giron de l'Eglise, se sont mis a rechercher les fondements
philosophiques des idees religieuses, et a demontrer rationnellement
comment l'homme croit en Dieu. Il ne faut meme pas tenir toujours grand
compte aux ecrivains de telle ou telle opinion inusitee, de telles ou
telles consequences singulieres, qu'on peut apercevoir ou demeler dans
leurs systemes; ils n'ont pas toujours eu volonte ni conscience de
penser ce qu'ils ont dit. Dans ces temps d'erudition, ou les livres
etaient rares et les idees plus encore que les livres, on dependait
beaucoup de l'auteur qu'on avait lu, on citait sans discernement, on
copiait sans choix, et l'on empruntait aveuglement a des ouvrages
contradictoires, a des sectes opposees, des opinions peu conciliables,
dont on meconnaissait la p
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