n humaine; mais cette excuse, Abelard l'a souvent
invoquee; qu'elle lui profite egalement. On ne peut condamner comme une
heresie ce qu'on doit relever comme une expression fautive. L'autorite
ne peut regler ses droits sur ceux de la critique.
Il doit etre permis d'observer que, pour avoir voulu determiner
scientifiquement les elements du dogme de la Trinite, l'Eglise l'a
complique, et que les expressions qu'elle a introduites ou consacrees,
sont devenues une source de difficultes, d'erreurs et d'heresies. A lire
sans prevention les Ecritures, rien ne parait moins indispensable
que d'attacher un sens sacramentel aux mots de _generation_ et de
_procession_. Le premier, si nous ne nous trompons, se rencontre trois
fois dans le Nouveau-Testament avec application au Sauveur. Dans les
Actes, Philippe trouve l'eunuque du roi Candace lisant un passage
d'Isaie, que les interpretes et Philippe lui-meme appliquent au Messie,
et dans lequel sont ces mots: _Qui pourra raconter son origine_[327]?
C'est le mot _origine_ qu'emploie Sacy, et le latin porte: _Generationem
ejus quis enarrabit_? Le grec emploie le mot [Grec: _genean_], qui a le
meme radical que celui de generation; et c'est un des textes dont
on s'appuie pour consacrer ce dernier terme. Or, il est evident
que l'expression est ici generale, et que tous les mots _origine,
generation, extraction, naissance_, auraient pu etre indifferemment
employes dans ce passage. Jesus-Christ, dans deux autres, est nomme
_Filius unigenitus_ ([Grec: _monogenes uios_])[328]. Sacy traduit
tout simplement _le Fils unique_, et assurement ce mot n'ajoute rien
d'important ni de special a l'idee que nous pouvait deja donner de
l'origine du Sauveur ce simple mot si expressif, _le Fils_. Temoin le
verset du psaume, souvent cite par les apotres: "Tu es mon fils, je
t'ai engendre aujourd'hui (Ps. II, 7); [Grec: gegenneka se], dans le
Nouveau-Testament (Act. XIII, 33, Hebr. I, 5 et V, 5). Quant au mot de
_procession_, il vient d'une traduction fort gratuite d'un verset de
l'Evangile selon saint Jean, ou on lit: _Spiritum veritatis qui a patre
procedit_ (XV, 26); "l'esprit de verite qui procede du Pere." Le
mot grec [Grec: ekporeuetai] veut dire proprement qu'il sort, qu'il
s'extrait. Sur ces textes seuls on n'imaginerait pas de regarder comme
essentiels a la Trinite, comme identifies au dogme, les deux mots que
nous discutons, et l'on se bornerait a dire et a croire que la Trinite,
c'est le Pere, le F
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