tionner tous
les bills qu'il avait presentes.
Aussitot que ses demandes furent accordees, il fit doubler les milices; il
porta l'armee de terre a soixante mille hommes, celle de mer a quatre-vingt
mille; il organisa de nouveaux corps d'emigres, et fit mettre en accusation
plusieurs membres des societes constitutionnelles. Le jury anglais,
garantie plus solide que le parlement, acquitta les prevenus; mais peu
importait a Pitt, qui avait maintenant dans les mains tous les moyens de
reprimer le moindre mouvement politique, et de deployer une puissance
colossale en Europe.
C'etait le moment de profiter de cette guerre universelle pour accabler la
France, pour ruiner a jamais sa marine, et lui enlever ses colonies;
resultat beaucoup plus sur et plus desirable aux yeux de Pitt que la
repression de quelques doctrines politiques et religieuses. Il avait reussi
l'annee precedente a armer contre la France les deux puissances maritimes
qui auraient toujours du lui rester alliees, l'Espagne et la Hollande; il
s'attachait a les maintenir dans leur erreur politique, et a en tirer le
plus grand parti contre la marine francaise. L'Angleterre pouvait faire
sortir de ses ports au moins cent vaisseaux de ligne, l'Espagne quarante,
la Hollande vingt, sans compter encore une multitude de fregates. Comment
la France, avec les cinquante ou soixante vaisseaux qui lui restaient
depuis l'incendie de Toulon, pouvait-elle resister a de telles forces?
Aussi, quoiqu'on n'eut pas livre encore un seul combat naval, le pavillon
anglais dominait sur la Mediterranee, sur l'Ocean atlantique et la mer des
Indes. Dans la Mediterranee, les escadres anglaises menacaient les
puissances italiennes qui voulaient rester neutres, bloquaient la Corse
pour nous l'enlever, et attendaient le moment de debarquer des troupes et
des munitions dans la Vendee. En Amerique, elles entouraient nos Antilles,
et cherchaient a profiter des affreuses discordes qui regnaient entre les
blancs, les mulatres et les noirs, pour s'en emparer. Dans la mer des
Indes, elles achevaient l'etablissement de la puissance britannique, et la
ruine de Pondichery. Avec une campagne encore, notre commerce etait
detruit, quelque fut le sort de nos armes sur le continent. Ainsi rien
n'etait plus politique que la guerre faite par Pitt a la France, et
l'opposition avait tort de la critiquer sous le rapport de l'utilite. Elle
n'aurait eu raison que dans un cas, et ce cas ne s'est pas realise encore;
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