les initiations, en presence de la
mere de Dieu, de dom Gerle et des principaux elus. Cette secte commencait a
etre connue, et on savait vaguement que Robespierre etait pour elle un
prophete. Ainsi tout contribuait a le grandir et a le compromettre.
C'etait surtout parmi ses collegues que les ombrages commencaient a naitre.
Des divisions se prononcaient deja, et c'etait naturel, car la puissance du
comite etant etablie, le temps des rivalites etait venu. Le comite s'etait
partage en plusieurs groupes distincts. La mort de Herault-Sechelles avait
reduit a onze les douze membres qui le composaient. Jean-Bon-Saint-Andre et
Prieur (de la Marne) n'avaient pas cesse d'etre en mission. Carnot etait
entierement occupe de la guerre, Prieur (de la Cote-d'Or) des
approvisionnemens, Robert Lindet des subsistances. On appelait ceux-ci les
gens _d'examen_. Ils ne prenaient aucune part ni a la politique ni aux
rivalites. Robespierre, Saint-Just, Couthon, s'etaient rapproches. Une
espece de superiorite d'esprit et de manieres, le grand cas qu'ils
semblaient faire d'eux-memes, et le mepris qu'ils semblaient avoir pour
leurs autres collegues, les avaient portes a se ranger a part; on les
nommait les gens de _la haute main_. Barrere n'etait a leurs yeux qu'un
etre faible et pusillanime, ayant de la facilite au service de tout le
monde, Collot-d'Herbois qu'un declamateur de clubs, Billaud-Varennes qu'un
esprit mediocre, sombre et envieux. Ces trois derniers ne leur pardonnaient
pas leurs dedains secrets. Barrere n'osait se prononcer; mais
Collot-d'Herbois, et surtout Billaud, dont le caractere etait indomptable,
ne pouvaient dissimuler la haine dont ils commencaient a s'enflammer. Ils
cherchaient a s'appuyer sur leurs collegues appeles gens _d'examen_, et a
les mettre de leur cote. Ils pouvaient esperer un appui de la part du
comite de surete generale, qui commencait a etre importune de la suprematie
du comite de salut public. Specialement borne a la police, et souvent
surveille ou controle dans ses operations par le comite de salut public, le
comite de surete generale supportait impatiemment cette dependance. Amar,
Vadier, Vouland, Jagot, Louis (du Bas-Rhin), ses membres les plus cruels,
etaient en meme temps les plus disposes a secouer le joug. Deux de leurs
collegues, qu'on appelait _les ecouteurs_, les observaient pour le compte
de Robespierre, et cet espionnage leur etait devenu insupportable. Les
mecontens de l'un et l'autre comite po
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