ueillait dans ses tournees.
A Lyon, les sanglantes executions ordonnees par Collot-d'Herbois avaient
cesse. La commission revolutionnaire venait de rendre compte de ses
travaux, et avait fourni le nombre des acquittes et des condamnes. Mille
six cent quatre-vingt-quatre individus avaient ete guillotines, fusilles ou
mitrailles. Mille six cent quatre-vingt-deux avaient ete mis en liberte,
par la _justice de la commission_.
Le Nord avait aussi son proconsul. C'etait Joseph Lebon. Il avait ete
pretre, et avouait lui-meme que dans sa jeunesse il aurait pousse le
fanatisme religieux jusqu'a tuer son pere et sa mere, si on le lui avait
ordonne. C'etait un veritable aliene, moins feroce peut-etre que Carrier,
mais encore plus frappe de folie. A ses paroles, a sa conduite, on voyait
que sa tete etait egaree. Il avait fixe sa principale residence a Arras. Il
avait institue un tribunal avec l'autorisation du comite de salut public,
et parcourait les departemens du Nord, suivi de ses juges et d'une
guillotine. Il avait visite Saint-Pol, Saint-Omer, Bethune, Bapaume, Aire,
etc., et avait laisse partout des traces sanglantes. Les Autrichiens
s'etant approches de Cambray, et Saint-Just ayant cru apercevoir que les
aristocrates de cette ville entretenaient des liaisons cachees avec
l'ennemi, il y appela Lebon, qui en quelques jours envoya a l'echafaud une
multitude de malheureux, et pretendit avoir sauve Cambray par sa fermete.
Quand Lebon avait fini ses tournees, c'est a Arras qu'il revenait. La, il
se livrait aux plus degoutantes orgies, avec ses juges et divers membres
des clubs. Le bourreau etait admis a sa table, et y etait traite avec la
plus grande consideration. Lebon assistait aux executions, place sur un
balcon; de la il parlait au peuple, et faisait jouer la _ca ira_ pendant
que le sang coulait. Un jour, il venait de recevoir la nouvelle d'une
victoire, il courut a son balcon, et fit suspendre l'execution, afin que
les malheureux qui allaient recevoir la mort eussent connaissance des
succes de la republique.
Lebon avait mis tant de folie dans sa conduite, qu'il etait accusable, meme
devant le comite de salut public. Des habitans d'Arras s'etaient refugies a
Paris, et faisaient tous leurs efforts pour parvenir aupres de leur
concitoyen Robespierre, et lui faire entendre leurs plaintes. Quelques-uns
l'avaient connu, et meme oblige dans sa jeunesse; mais ils ne pouvaient
parvenir a le voir. Le depute Guffroy, qui etait d'Arr
|