eussit bientot, et le systeme
de la terreur fut renverse.
On se demande ce qui serait arrive si Robespierre l'eut emporte. L'abandon
ou il se trouva prouve que c'etait impossible. Mais eut-il ete vainqueur,
il aurait fallu ou qu'il cedat au sentiment general, ou qu'il succombat
plus tard. Comme tous les usurpateurs, il aurait ete force de faire
succeder aux horreurs des factions, un regime calme et doux. Mais
d'ailleurs ce n'est pas a lui qu'il appartenait d'etre cet usurpateur.
Notre revolution etait trop vaste pour que le meme homme, depute a la
constituante en 1789, fut proclame empereur ou protecteur en 1804, dans
l'eglise Notre-Dame. Dans un pays moins avance et moins etendu, comme
l'etait l'Angleterre, ou le meme homme pouvait encore etre tribun et
general, et reunir ces deux fonctions, un Cromwell a pu etre a la fois
homme de parti au commencement, soldat usurpateur a la fin. Mais dans une
revolution aussi etendue que la notre, et ou la guerre a ete si terrible et
si dominante, ou le meme individu ne pouvait occuper en meme temps la
tribune et les camps, les hommes de parti se sont d'abord devores entre
eux; apres eux sont venus les hommes de guerre, et un soldat est reste le
dernier maitre.
Robespierre ne pouvait donc remplir chez nous le role d'usurpateur.
Pourquoi lui fut-il donne de survivre a tous ces revolutionnaires fameux,
qui lui etaient si superieurs en genie et en puissance, a un Danton, par
exemple?... Robespierre etait integre, et il faut une bonne reputation pour
captiver les masses. Il etait sans pitie, et elle perd ceux qui en ont dans
les revolutions. Il avait un orgueil opiniatre et perseverant, et c'est le
seul moyen de se rendre toujours present aux esprits. Avec cela, il dut
survivre a tous ses rivaux. Mais il fut de la pire espece des hommes. Un
devot sans passions, sans les vices auxquels elles exposent, mais sans le
courage, la grandeur et la sensibilite qui les accompagnent ordinairement;
un devot ne vivant que de son orgueil et de sa croyance, se cachant au jour
du danger, revenant se faire adorer apres la victoire remportee par
d'autres, est un des etres les plus odieux qui aient domine les hommes, et
on dirait les plus vils, s'il n'avait eu une conviction forte et une
integrite reconnue.
CHAPITRE XXIII.
CONSEQUENCES DU 9 THERMIDOR.--MODIFICATIONS APPORTEES AU GOUVERNEMENT
REVOLUTIONNAIRE.--REORGANISATION DU PERSONNEL DES COMITES.--REVOCATION DE
LA LOI DU 22 PRAIRIAL; DE
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