ns." Des applaudissemens interrompent Tallien; il
reprend: "Continuateurs de Robespierre, s'ecrie-t-il, n'esperez aucun
succes, la convention est determinee a perir plutot que de souffrir une
nouvelle tyrannie. La convention veut un gouvernement inflexible, mais
juste. Il est possible que quelques patriotes aient ete trompes sur le
compte de certains detenus; nous ne croyons pas a l'infaillibilite des
hommes. Mais qu'on denonce les individus elargis mal a propos, et ils
seront reincarceres. Pour moi, je fais ici un aveu sincere; j'aime mieux
voir aujourd'hui en liberte vingt aristocrates qu'on reprendra demain, que
de voir un patriote rester dans les fers. Eh quoi! la republique avec ses
douze cent mille citoyens armes aurait peur de quelques aristocrates! Non,
elle est trop grande, elle saura partout decouvrir et frapper ses ennemis."
Tallien, souvent interrompu par les applaudissemens, en recoit de plus
bruyans encore en finissant son discours. Apres ces explications generales,
on revient a la loi du 23, et a la disposition nouvelle que Granet voulait
y faire ajouter. Les partisans de la loi soutiennent qu'on ne doit pas
craindre de se montrer en faisant un acte patriotique, tel que celui de
reclamer un citoyen injustement detenu. Ses adversaires repondent que rien
n'est plus dangereux que les listes; que celles des vingt mille et des huit
mille ont ete le sujet d'un trouble continuel; que tous ceux qui s'y
trouvaient inscrits ont vecu dans l'effroi; et que, n'eut-on plus aucune
tyrannie a craindre, les individus portes sur les nouvelles listes
n'auraient plus aucun repos. Enfin on transige. Bourdon propose d'imprimer
les noms des prisonniers elargis, sans y ajouter ceux des repondans qui ont
sollicite la mise en liberte. Cette proposition est accueillie, et il est
decide qu'on imprimera le nom des elargis seulement. Tallien, qui n'etait
pas satisfait de ce moyen, remonte aussitot a la tribune. "Puisque vous
avez decrete, dit-il, d'imprimer la liste des citoyens rendus a la liberte,
vous ne pouvez refuser de publier celle des citoyens qui les ont fait
incarcerer. Il est juste aussi que l'on connaisse ceux qui denoncaient et
faisaient renfermer de bons patriotes." L'assemblee, surprise par la
demande de Tallien, trouve d'abord la proposition juste, et la decrete
aussitot. A peine la decision est-elle rendue, que plusieurs membres de
l'assemblee se ravisent. Voila une liste, dit-on, qui sera opposee a la
precedente; _c'e
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