usion augmente. On revient a la
question de l'impression. Amar insiste pour le renvoi du discours aux
comites. Barrere, voyant l'avantage se prononcer pour ceux qui veulent le
renvoi aux comites, vient s'excuser en quelque sorte d'avoir demande le
contraire. Enfin la convention revoque sa decision, et declare que le
discours de Robespierre, au lieu d'etre imprime, sera renvoye a l'examen
des deux comites.
Cette seance etait un evenement vraiment extraordinaire. Tous les deputes,
habituellement si soumis, avaient repris courage. Robespierre, qui n'avait
jamais eu que de la morgue et point d'audace, etait surpris, depite,
abattu. Il avait besoin de se remettre. Il court chez ses fideles jacobins
pour retrouver des amis, et leur emprunter du courage. On y etait deja
instruit de l'evenement, et on l'attendait avec impatience. A peine
parait-il qu'on le couvre d'applaudissemens. Couthon le suit et partage les
memes acclamations. On demande la lecture du discours. Robespierre emploie
encore deux grandes heures a le leur repeter. A chaque instant il est
interrompu par des cris et des applaudissemens frenetiques. A peine a-t-il
acheve, qu'il ajoute quelques paroles d'epanchement et de douleur. "Ce
discours que vous venez d'entendre, leur dit-il, est mon testament de mort.
Je l'ai vu aujourd'hui; la ligue des mechans est tellement forte que je ne
puis pas esperer de lui echapper. Je succombe sans regret; je vous laisse
ma memoire; elle vous sera chere, et vous la defendrez." A ces paroles, on
s'ecrie qu'il n'est pas temps de craindre et de desesperer, qu'au contraire
on vengera le pere de la patrie de tous les mechans reunis. Henriot, Dumas,
Coffinhal, Payan, l'entourent, et se declarent tout prets a agir. Henriot
dit qu'il connait encore le chemin de la convention. "Separez, leur dit
Robespierre, les mechans des hommes faibles; delivrez la convention des
scelerats qui l'oppriment; rendez-lui le service qu'elle attend de vous,
comme au 31 mai et au 2 juin. Marchez, sauvez encore la liberte! Si malgre
tous ces efforts il faut succomber, eh bien! mes amis, vous me verrez boire
la cigue avec calme.--Robespierre, s'ecrie un depute, je la boirai avec
toi!" Couthon propose a la societe un nouveau scrutin epuratoire, et veut
qu'on expulse a l'instant meme les deputes qui ont vote contre Robespierre;
il en avait sur lui la liste, et la fournit sur-le-champ. Sa proposition
est adoptee au milieu d'un tumulte epouvantable. Collot-d'Herbois
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