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coeurs genereux, ce jour enfin de felicite et de pure ivresse, le president
de la convention nationale, parlant au peuple assemble, a ete insulte par
des hommes coupables, et que ces hommes etaient des representans. On l'a
appele un tyran! et pourquoi? parce qu'il a acquis quelque influence en
parlant le langage de la verite. "Et que pretendez-vous, s'ecrie-t-il, vous
qui voulez que la verite soit sans force dans la bouche des representans du
peuple francais? La verite sans doute a sa puissance, elle a sa colere, son
despotisme; elle a ses accens[1] touchans[1], terribles, qui retentissent
avec force dans les coeurs purs comme dans les consciences coupables, et
qu'il n'est pas plus donne au mensonge d'imiter qu'a Salmonee d'imiter les
foudres du ciel. Mais accusez-en la nation, accusez-en le peuple qui la
sent et qui l'aime.--Qui suis-je, moi qu'on accuse? un esclave de la
liberte, un martyr vivant de la republique, la victime autant que l'ennemi
du crime. Tous les fripons m'outragent; les actions les plus indifferentes,
les plus legitimes de la part des autres, sont des crimes pour moi. Un
homme est calomnie des qu'il me connait. On pardonne a d'autres leurs
forfaits; on me fait a moi un crime de mon zele. Otez-moi ma conscience, je
suis le plus malheureux des hommes; je ne jouis pas meme des droits de
citoyen, que dis-je? il ne m'est pas meme permis de remplir les devoirs
d'un representant du peuple."
Robespierre se defend ainsi par des declamations subtiles et diffuses, et,
pour la premiere fois, il trouve la convention morne, silencieuse, et comme
ennuyee de la longueur de ce discours. Il arrive enfin au plus vif de la
question: il accuse. Parcourant toutes les parties du gouvernement, il
critique d'abord avec une mechancete inique le systeme financier. Auteur de
la loi du 22 prairial, il s'etend avec une pitie profonde sur la loi des
rentes viageres; il n'y a pas jusqu'au _maximum_, contre lequel il semble
s'elever, en disant que les intrigans ont entraine la convention dans des
mesures violentes. "Dans les mains de qui sont vos finances? dans les
mains, s'ecrie-t-il, de feuillans, de fripons connus, des Cambon, des
Mallarme, des Ramel." Il passe ensuite a la guerre, il parle avec dedain de
ces victoires, "qu'on vient decrire avec une _legerete academique_, comme
si elles n'avaient coute ni sang ni travaux. Surveillez, s'ecrie-t-il,
surveillez la victoire; surveillez la Belgique. Vos ennemis se retirent et
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