maison fournit quelques livres de ce sel precieux. Des quartiers de
Paris se reunissaient pour apporter en pompe a la convention et aux
Jacobins le salpetre qu'ils avaient fabrique. On imagina une fete dans
laquelle chacun venait deposer ses offrandes sur l'autel de la patrie. On
donnait a ce sel des formes emblematiques; on lui prodiguait toutes sortes
d'epithetes: on l'appelait _sel vengeur, sel liberateur_. Le peuple s'en
amusait, mais il en produisait des quantites considerables, et le
gouvernement avait atteint son but. Un peu de desordre se melait
naturellement a tout cela. Les caves etaient creusees, et la terre, apres
avoir ete lessivee, gisait dans les rues quelle embarrassait et degradait.
Un arrete du comite de salut public mit un terme a cet abus, et les terres
lessivees furent replacees dans les caves. Les salins manquaient; le comite
ordonna que toutes les herbes qui n'etaient employees ni a la nourriture
des animaux, ni aux usages domestiques ou ruraux, seraient de suite
brulees, pour servir a l'exploitation du salpetre ou etre converties en
salins.
Le gouvernement eut l'art d'introduire encore une autre mode non moins
avantageuse. Il etait plus facile de lever des hommes et de fabriquer des
armes que de trouver des chevaux: l'artillerie et la cavalerie en
manquaient. La guerre les avait rendus rares; le besoin et le
rencherissement general de toutes choses en augmentaient beaucoup le prix.
Il fallut recourir au grand moyen des requisitions, c'est-a-dire prendre de
force ce qu'un besoin indispensable exigeait. On leva dans chaque canton un
cheval sur vingt-cinq, en le payant neuf cents francs. Cependant, quelque
puissante que soit la force, la bonne volonte est plus efficace encore. Le
comite imagina de se faire offrir un cavalier tout equipe par les jacobins.
L'exemple fut alors suivi partout. Communes, clubs, sections,
s'empressaient d'offrir a la republique ce qu'on appela des _cavaliers
jacobins_, tous parfaitement montes et equipes.
On avait des soldats, il fallait des officiers. Le comite agit ici avec sa
promptitude ordinaire. "La revolution, dit Barrere, doit tout hater pour
ses besoins. La revolution est a l'esprit humain ce que le soleil de
l'Afrique est a la vegetation." On retablit l'ecole de Mars; des jeunes
gens, choisis dans toutes les provinces, se rendirent a pied et
militairement, a Paris. Campes sous des tentes, au milieu de la plaine des
Sablons, ils devaient s'y instruire rapidemen
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