re son coeur sur la resolution ou il est de lui remettre et a ses
enfans la couronne de France, lui represente qu'etant religieux
et pretre, il ne cessera de prier le Seigneur pour eux et pour la
prosperite de l'etat, la conjure enfin, par tout ce qu'il y a de plus
sacre, de ne point s'opposer a l'accomplissement d'un dessein inspire du
Ciel.
Marguerite, frappee comme d'un coup de tonnerre, ne repondit rien; mais
ayant fait venir ses enfans, elle leur demanda, en presence du comte
d'Anjou, leur oncle, qu'elle avait aussi mande, s'ils aimaient mieux
etre appeles fils de pretre que fils de roi. Les princes, ne concevant
rien a ce discours, elle ne les laissa pas longtemps dans cet embarras.
Apprenez, leur dit-elle, que les Jacobins ont tellement fascine l'esprit
du roi votre pere, qu'il veut abdiquer la royaute pour se faire precheur
et pretre. Le comte d'Anjou, a cette nouvelle, entra en fureur,
s'emporta jusqu'a l'insolence contre son frere, menaca les seducteurs
des plus terribles chatimens, et envoya de suite dans sa province
d'Anjou faire defense de les laisser precher, et meme de leur distribuer
aucune aumone.
Louis, fils aine du monarque, ne fut pas plus maitre de son
ressentiment; il se repandit en discours si outrageans contre les freres
precheurs, que le roi, pour le faire taire, lui donna un soufflet.
"Seigneur, s'ecria le jeune prince avec feu, je n'oublierai jamais le
respect que je vous dois; il n'y a en effet que mon pere et mon roi qui
puisse me frapper impunement; mais si le Ciel m'eleve un jour sur le
trone, j'en jure par monseigneur saint Denis, notre patron, je ferai
chasser tous ces precheurs du royaume."
Le bon roi, etonne de tant de contradictions, craignit que son
inclination pour la retraite ne fut moins une inspiration du Ciel, qu'un
gout trop decide pour le repos; il connaissait la tendresse de la reine,
la fierte du prince son successeur, les violences du comte d'Anjou,
l'attachement de ses sujets. Il ne jugea pas que Dieu voulut un
sacrifice auquel tout semblait s'opposer, l'honneur de sa maison et le
bonheur de ses peuples.
_Traite de Louis avec le roi d'Aragon_.
Le roi, qui suivait toujours son dessein d'etablir une solide paix dans
son royaume, conclut dans cette vue, l'annee suivante, deux importans
traites avec Jacques 1er, roi d'Aragon, et Henri III, roi d'Angleterre.
Quoique les rois d'Aragon eussent presque toujours vecu en paix avec les
rois de France, il y avait toutefoi
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