en Italie par les Alpes, se mit en campagne.
Mainfroi, de son cote, avec une armee plus forte que celle de Charles,
se mit en etat de lui resister. Mais, ayant reflechi sur le peril qui le
menacait, et redoutant la valeur de la noblesse francaise, il envoya des
ambassadeurs au pape pour lui faire des propositions de paix. Urbain
refusa de les entendre. Mainfroi en fit faire aussi a Charles: il
repondit a ceux qu'il lui envoya, _dites de ma part au soudan de
Lucerie_ (c'etait une ville tenue par les Sarrasins, qui etaient au
service de Mainfroi) _que devant qu'il soit peu de jours, il m'aura mis
en paradis, ou que je l'aurai envoye en enfer_.
Enfin apres plusieurs combats dans lesquels Charles eut toujours de
l'avantage, et apres s'etre rendu maitre de plusieurs villes, les deux
armees se joignirent dans la plaine de Benevent, ou apres un combat
tres-opiniatre celle de Mainfroi fut mise en deroute, et lui-meme y
perdit la vie. Les historiens du temps nous apprennent que Richard,
comte de Caserte, fut cause du malheur de Mainfroi, ayant quitte son
parti et livre aux Francais un passage important, pour se venger de
Mainfroi, qui etait son beau-frere, et dont il etait l'ennemi cache,
parce que ce prince avait abuse de la femme du comte. C'est ainsi que
souvent la justice divine dispose les choses de telle maniere, qu'un
crime est puni par un autre crime.
Pendant que Charles, comte d'Anjou, frere du roi, etait occupe, comme je
viens de le rapporter, a la conquete du royaume de Sicile, Louis, qui
n'y avait pris aucune part, toujours egal a lui-meme, continuait
de donner a la France le spectacle de ses vertus pacifiques et
bienfaisantes, qui sont en meme temps la gloire du prince et le bonheur
des peuples. Mais quelque ardent que fut son zele pour la justice,
jamais il ne l'emporta au-dela des bornes. La moderation la plus sage
fut toujours l'ame de ses actions: c'est ce qu'on remarque surtout au
sujet du droit d'asile. Un voleur avait ete pris par les officiers du
monarque dans l'eglise des Cordeliers de Tours; l'archeveque se recria
contre la pretendue profanation, et redemanda le coupable avec grand
bruit. Le roi voulut bien avoir egard a ses plaintes; il assembla un
parlement, ou, l'affaire scrupuleusement examinee, il fut ordonne que
le criminel serait reconduit a l'eglise; mais que les religieux, ou les
gens du prelat, l'en chasseraient aussitot, de maniere qu'il put etre
repris, sinon qu'on irait le saisir jusqu'a
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