des le premier choc, se renversent les
uns sur les autres, jettent tous leurs armes, et cherchent leur salut
dans une fuite precipitee. On les poursuivit jusqu'a leur camp, qu'ils
abandonnerent. Comme on craignait quelque embuscade, et qu'on voulait
les empecher de se rallier, Philippe fit defense aux soldats, sous les
peines les plus severes, de s'arreter au pillage: il fut obei. On
poussa les fuyards jusqu'aux defiles des montagnes, ou la prudence ne
permettait pas de s'engager. Les vainqueurs revinrent ensuite sur leurs
pas, pillerent le camp, ou ils trouverent des provisions immenses,
egorgerent, dans la premiere chaleur, et malades et blesses, emporterent
tout ce qui pouvait etre a leur usage, et brulerent le reste.
Mais si les armes des croises prosperaient, leur nombre diminuait chaque
jour par les maladies qui continuaient de les desoler. Deja elles
commencaient a attaquer les troupes du roi de Sicile; elles
n'epargnaient pas meme les naturels du pays: toute la contree etait
infectee de la contagion.
On dit que le roi de Tunis, pour se soustraire a ce poison, se tenait
ordinairement dans des cavernes souterraines, ou il croyait que le
mauvais air ne pouvait penetrer. L'horreur de sa situation, la nouvelle
defaite de ses troupes, la crainte de se voir assiege dans sa capitale,
tout contribuait a ses alarmes: il envoya donc proposer la paix ou une
treve.
Les conditions qu'il offrait etaient des plus avantageuses pour les deux
nations. Le conseil des croises fut neanmoins partage sur le parti qu'on
devait prendre. Les uns etaient d'avis qu'il fallait pousser vivement
les Sarrasins, qui, dans les combats, ne pouvaient pas tenir contre les
chretiens, leur tuer le plus de monde que l'on pourrait, s'emparer de
Tunis, leur plus fort rempart, le detruire si l'on ne pouvait le garder,
et par la s'ouvrir un chemin sur pour transporter les armees chretiennes
en Palestine.
Les autres remontraient qu'il n'etait pas si facile d'exterminer une
nation si nombreuse; que les combats qu'il faudrait livrer, le siege,
la disette, les maladies emporteraient sans doute beaucoup de monde;
qu'avant qu'on fut maitre de la place, on se trouverait au plus fort de
l'hiver, temps ou la mer, devenue orageuse, empecherait ou retarderait
du moins l'arrivee des convois; enfin, que l'objet principal de cette
croisade etant de secourir les chretiens de Syrie, on ne devait pas
negliger l'occasion de se procurer, par une bonne paix, l'avantag
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