e qu'on
etait venu chercher jusque sur les cotes d'Afrique. Le roi de Sicile
appuyait fortement cet avis, qui etait aussi celui des plus grands
seigneurs de l'armee. Il prevalut; la treve fut conclue pour dix ans.
Les conditions etaient "que le port de Tunis serait franc a l'avenir, et
que les marchands ne seraient plus obliges a ces impots immenses, dont
ils avaient ete surcharges par le passe. (On prenait la dixieme partie
des marchandises qu'ils apportaient.) Que tous les chretiens qu'on avait
arretes a l'approche de l'armee francaise, seraient remis en liberte;
qu'ils auraient le libre exercice de leur religion; qu'ils pourraient
faire batir des eglises; qu'on ne mettrait aucun obstacle a la
conversion des mahometans; que le roi de Tunis jurerait de payer tous
les ans le tribut ordinaire au roi de Sicile; qu'il rembourserait au
monarque et aux barons francais les depenses qu'ils avaient faites
depuis le commencement de la guerre (ce qui montait a deux cent mille
onces d'or), dont la moitie serait payee comptant, et l'autre dans deux
ans."
On ne pouvait rien esperer de plus favorable dans les circonstances
ou l'on se trouvait. La multitude en murmura; elle s'etait flattee de
s'enrichir par le pillage de Tunis: elle accusa hautement le prince
sicilien d'avoir sacrifie l'honneur de la religion a son interet
particulier. Charles meprisa ces clameurs. On recut, le 1er novembre,
les sermens du roi mahometan. Aussitot toutes les hostilites cesserent.
Les Francais allerent a la ville; les Sarrasins vinrent au camp, ou l'on
vit bientot regner l'abondance; et les maladies diminuerent.
Le prince Edouard d'Angleterre arriva sur ces entrefaites, avec la
princesse sa femme, Richard son frere, Henri d'Allemagne, son cousin, et
un grand nombre de seigneurs. On pretend qu'il desapprouva hautement
la convention qu'on venait de faire, et que, pour en temoigner son
mecontentement, il s'enferma dans sa tente, sans vouloir participer aux
deliberations, ni au partage que l'on fit de l'argent des infideles, sur
lequel on fit une liberalite aux soldats. C'est peut-etre ce qui a donne
lieu a la maniere emportee dont les historiens anglais parlent de ce
traite.
Le roi de Tunis en ayant fidelement execute les conditions, les croises
se disposerent a se rembarquer. Lorsque tout fut pret, le roi de Sicile,
le connetable, Pierre le chambellan, et quelques autres seigneurs, se
rendirent sur le rivage pour empecher la confusion a l'embarque
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