omme un digne
chef; les gens de bien, comme le gardien et le soutien des lois; les
eveques, comme le protecteur et le defenseur de la religion; tous les
Francais en general, comme le plus grand roi qui eut regne sur la
nation. On admirait les secrets de cette Providence impenetrable, qui
avait voulu le sanctifier dans ses souffrances: tous s'entretenaient des
grandes qualites et des vertus du saint monarque. On le voyait, dans sa
tente, etendu sur la cendre: sa bouche etait encore vermeille, son teint
frais; on eut dit qu'il ne faisait que sommeiller.
Il venait d'expirer, lorsqu'on entendit les trompettes des croises
siciliens. Charles arrivait avec de belles troupes et toutes sortes de
rafraichissemens. Surpris que personne ne vienne au-devant de lui, il
soupconne quelque malheur. Il descend a terre, laissant son armee sous
la conduite de ses lieutenans; il monte a cheval, pousse a toute bride
vers le camp, et ayant mis pied a terre a la vue du pavillon royal, il y
entre avec une inquietude que tout ce qu'il voit ne fait que redoubler.
Quel spectacle que celui qui s'offre a ses yeux! Il en est saisi; ce
coeur si fier, si hautain, se livre a tous les transports de la plus
vive douleur. Il se prosterne aux pieds de son saint frere, et les baise
en versant un torrent de larmes.
Apres lui avoir donne ces dernieres marques de son amitie, il s'occupe
a lui faire rendre les derniers devoirs. On ignorait alors l'art
d'embaumer les corps. On fit bouillir celui du saint roi dans du vin
et de l'eau, avec des herbes aromatiques. Charles, par ses instantes
prieres, obtint du roi, son neveu, la chair et les entrailles de Louis,
qu'il envoya a l'abbaye de Montreal pres de Palerme, lieu que ces
precieuses reliques ont rendu si fameux dans la suite, par les mircles
sans nombre qu'elles ont operes. Le coeur et les os furent mis dans un
cercueil, pour etre transportes a l'abbaye de St-Denis, ou le pieux
monarque avait choisi sa sepulture. Deja Geoffroy de Beaulieu, son
confesseur, charge de les conduire en France avec quelques seigneurs de
la premiere qualite, se preparait a mettre a la voile, lorsque toute
l'armee s'y opposa, protestant qu'elle ne consentirait jamais a se voir
privee d'un tresor, dont la possession etait le salut commun. Philippe,
encore plus rempli de confiance aux merites du feu roi son pere, se
rendit avec plaisir aux voeux de ses sujets. Beaulieu partit avec
Guillaume de Chartres, dominicain, et Jean de Mons, cor
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