ux Francais: tout ce qu'ils trouvent de
Sarrasins est passe au fil de l'epee.
Louis cependant, a la tete d'une partie de l'armee, observait les
mouvemens des ennemis, qui paraissaient en armes sur toutes les
montagnes voisines, et qui n'oserent toutefois rien tenter pour defendre
une place, dont la conquete, selon l'opinion des Africains, entrainait
celle de tout le pays; opinion mal fondee, ainsi que l'experience l'a
demontre. Carthage fut prise en meme temps que le chateau, et ses
vainqueurs ne purent entamer le reste du royaume. On la nettoya: le roi
y etablit des hopitaux pour les malades, et les princesses brus[1],
(_a_) fille, (_b_) belle-soeur, (_c_) et niece (_d_) du monarque, y
allerent demeurer pour etre plus commodement.
[Note 1: (_a_) Isabelle d'Aragon, epouse de Philippe-le-Hardi; Jolande
de Bourgogne, comtesse de Nevers, femme de Jean de France, surnomme
Tristan; Jeanne de Chatillon, comtesse de Blois, qui accompagnait son
mari Pierre de France, comte d'Alencon; (_b_) Isabelle de France,
reine de Navarre; (_c_) Jeanne de Toulouse, femme d'Alphonse, comte
de Poitiers; (_d_) Amicie de Courtenay, femme de Robert II, comte
d'Artois.]
Le roi de Tunis, outre de cette perte, ne garda plus de mesures. Il
avait envoye declarer a l'armee francaise que si elle venait assieger
sa ville, il ferait massacrer tous les chretiens qui etaient dans ses
etats. On lui avait repondu que, s'il faisait la guerre en barbare, on
le traiterait de meme. Cette fierte l'epouvanta, mais ne lui abattit
point le courage. Il manda au monarque francais, que dans peu il le
viendrait chercher a la tete de cent mille hommes: etrange maniere,
sans doute, de se preparer a demander le bapteme! Mais deja les croises
etaient detrompes sur l'esperance qu'on avait concue de la conversion
de ce prince. On avait appris par deux esclaves qui etaient venus se
rendre, qu'il avait fait arreter tous les marchands qui faisaient
profession du christianisme, resolu de leur faire couper la tete si
les Francais paraissaient a la vue de Tunis. On voyait d'ailleurs, par
experience, qu'il n'y avait point de ruse dont il ne s'avisat pour
fatiguer l'armee; il ne cessait de faire donner l'alarme au camp; ses
troupes rodaient continuellement dans les environs: oser en sortir,
c'etait s'exposer a une mort certaine.
Un jour que Jean d'Acre, grand bouteiller de France, commandait la garde
la plus avancee, trois Sarrasins de bonne mine l'aborderent la lance
basse,
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