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prit aussi la croix; le duc de Bourgogne, son parent, soit zele pour la
religion, soit amour pour la gloire, temoigna la meme ardeur pour cette
expedition. Toute la noblesse du royaume imita leur exemple. On compte
parmi les plus considerables, les comtes de Saint-Paul, de Vendome, de
la Marche et de Soissons; Gilles et Hardouin de Mailly, Raoul et Jean de
Nesle, les seigneurs de Fiennes, de Nemours, de Montmorency, de Melun,
le comte de Guines, le sire de Harcourt, Matthieu de Roye, Florent de
Varennes, Raoul d'Etrees, Gilles de la Tournelle, Maurice de Craon, Jean
de Rochefort, le marechal de Mirepoix, Enguerrand de Bailleul, Pierre
de Saux, Jean de Beaumont, et grand nombre d'autres, dont les noms ne
subsistent plus aujourd'hui.
Cependant plusieurs personnes blamerent cette expedition; on alla meme
jusqu'a la traiter de pieuse extravagance, qu'un roi sage ne devait ni
projeter, ni autoriser. C'est, encore de nos jours, la plus commune
opinion sur ces entreprises de nos ancetres. Je n'entreprendrai point de
le justifier sur ce point, quant a present, ni de prouver que s'il y a
de la faute, ce fut moins celle de Louis que celle de son siecle: dans
un temps plus eclaire, il eut sans doute epargne cette tache a sa
gloire, si c'en est une. Il y a beaucoup de temerite a condamner
certaines actions des grands rois. Il faut, pour les juger
equitablement, se transporter dans les siecles ou ils ont vecu; il faut
examiner les usages de leur temps, et quelles en etaient les moeurs.
D'ailleurs le roi ne forcait personne a se croiser; c'etait l'effet des
exhortations des legats du pape et des ecclesiastiques du temps. Tous
ces seigneurs qui accompagnaient le roi, avec leurs chevaliers, y
allaient volontairement et a leurs depens. Ils croyaient faire une
action meritoire en allant combattre contre les infideles; et, s'ils y
mouraient, gagner la couronne du martyre: c'etait une opinion fortement
gravee dans le coeur de toutes les nations de l'Europe, comme on le voit
par le grand nombre de croisades qu'elles ont entreprises. Si l'on etait
bien persuade de la droiture des sentimens de saint Louis, on serait
plus circonspect a blamer sa conduite: il consultait principalement son
zele, et abandonnait le surplus a la Providence de Dieu. Il faut encore
convenir que ces expeditions n'ont fait aucun tort a son royaume pendant
son absence; qu'il n'a jamais ete plus puissant, et ses peuples plus
heureux. Il les a fait jouir d'une paix c
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