ut
le commerce de la mer Mediterranee. A quelque distance de la, vers
l'occident, on voyait la fameuse Carthage, qui, ruinee d'abord par les
Romains, ensuite par les Vandales et par les Arabes, subsistait encore,
mais sans aucune marque de son ancienne grandeur. Ce n'etait du temps de
Louis qu'une tres-petite ville, sans autre defense qu'un chateau assez
fort; ce n'est de nos jours qu'un amas de ruines, connu parmi les
Africains sous le nom de Bersak, avec une tour dite Almenare, ou la
Rocca de Mastinaces.
La flotte arriva a quelques milles de cet endroit celebre, vis-a-vis
d'un golfe qu'on appelait alors le port de Tunis. On y vit de loin deux
vaisseaux, quelques barques, et beaucoup de peuple fuyant vers les
montagnes. Aussitot, Florent de Varennes, qui faisait les fonctions
d'amiral, fut detache avec quelques galeres, pour aller reconnaitre les
lieux: c'etait un guerrier ardent, intrepide; il fit plus qu'on ne lui
avait commande. Voyant que personne ne paraissait, il s'empara du port,
se rendit maitre de tous les batimens qui s'y etaient retires, prit
terre sans la moindre difficulte, et manda au roi qu'il n'y avait point
de temps a perdre, qu'il fallait faire la descente, que les ennemis
consternes ne songeaient pas meme a s'y opposer.
Le sage monarque, qui apprehendait une surprise, craignit que l'amiral
ne se fut trop engage, le blama d'avoir passe ses ordres, et ne voulut
pas aller si vite; il fit assembler le conseil de guerre, ou les
opinions furent partagees. Toute la jeunesse etait d'avis qu'il fallait
donner, et profiter de cet avantage; mais les plus sages representerent
qu'il n'y avait rien de pret pour le debarquement, qu'on ne pouvait le
faire qu'en desordre et avec confusion; que la retraite des Sarrasins
etait sans doute un stratageme pour surprendre, pendant la nuit, les
troupes qu'on aurait mises a terre; qu'il valait mieux le remettre au
jour suivant, et marcher en ordre comme on avait fait a Damiette.
Ce dernier sentiment l'emporta; Varennes fut rappele. On employa le
reste de la journee a disposer la descente pour le lendemain. Le jour
paraissait a peine, qu'on vit le port et tous les environs couverts de
Sarrasins, cavalerie et infanterie. Les Francais n'en parurent que plus
animes; tous se jeterent dans les barques avec de grands cris de joie;
tous aborderent les armes a la main, mais personne n'eut occasion de
s'en servir; toute cette multitude de Barbares se mit a fuir sans faire
la moin
|