e roi ne
la crut pas en etat de prendre assez d'autorite, soit qu'elle n'eut pas
assez d'experience dans les affaires, auxquelles il lui avait toujours
donne peu de part, il ne jugea pas a propos de lui confier le
gouvernement de l'etat. Il choisit pour cet emploi Matthieu, abbe de
Saint-Denis, et Simon de Clermont, sire de Nesle, l'un et l'autre d'une
naissance distinguee, tous deux d'une probite reconnue et d'une sagesse
consommee. Le premier etait de l'ancienne famille des comtes de Vendome;
le second de l'illustre maison de Clermont en Beauvoisis, chevalier sans
reproche, grand homme de guerre, d'une superiorite de genie et d'une
droiture a toute epreuve. Louis leurs substitua, en cas de mort, deux
hommes celebres par leur merite, Philippe, eveque d'Evreux, et Jean
de Nesle, comte de Ponthieu, du chef de sa femme. Les nouveaux regens
furent revetus de toute la puissance du roi, dont ils sont qualifies les
lieutenans. Il n'en excepta que la nomination aux benefices dependans
de lui. Le religieux prince crut qu'un objet si important meritait une
attention particuliere: il etablit pour les conferer un conseil de
conscience, compose de l'eveque de Paris, du chancelier de Notre-Dame,
et des superieurs des Jacobins et des Cordeliers. Ce qu'il leur
recommanda surtout, fut de mettre toute leur application a donner a Dieu
les ministres les plus dignes de le servir, et a ne deposer les biens de
l'Eglise qu'entre des mains qui en sussent faire un usage legitime.
Le roi ayant ainsi regle les affaires les plus importantes de son
royaume, alla, suivant la coutume, prendre l'oriflamme a Saint-Denis,
fit sa priere devant le tombeau des bienheureux martyrs, et recut des
mains du legat le bourdon de pelerin. On le vit le lendemain, suivi
des princes ses enfans, du comte d'Artois, et d'un grand nombre de
seigneurs, marchant nu-pieds, se rendre du Palais a Notre-Dame, ou il
implora le secours du Ciel sur son entreprise. Il partit le meme jour
pour Vincennes, d'ou, prenant conge de la reine, non sans repandre
beaucoup de larmes de part et d'autre, il se rendit d'abord a Melun, a
Sens, a Auxerre, a Veselay, ensuite a Cluny, ou il passa les fetes de
Paques, puis a Macon, a Lyon, a Beaucaire, enfin a Aiguemortes, ou etait
le rendez-vous general des croises. Il n'y trouva point les vaisseaux
que les Genois s'etaient obliges de lui fournir pour le transport des
troupes. On ignore si ce fut negligence ou perfidie de leur part. Il est
du moin
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