Ils parcoururent ainsi une partie de la Normandie et de la
Bretagne au milieu de dangers continuels et de souffrances affreuses, et
vinrent se cacher aux environs de Brest, pour se rendre ensuite a
Bordeaux. Barbaroux, Petion, Salles, Louvet, Meilhan, Guadet, Kervelegan,
Gorsas, Girey-Dupre, collaborateur de Brissot, Marchenna, jeune Espagnol
qui etait venu chercher la liberte en France, Riouffe, jeune homme attache
par enthousiasme aux girondins, composaient cette troupe d'illustres
fugitifs, poursuivis comme traitres a la patrie, quoique tout prets
cependant a donner leur vie pour elle, et croyant meme encore la servir
alors qu'ils la compromettaient par la plus dangereuse diversion.
Dans la Bretagne, dans les departemens de l'Ouest et du bassin superieur
de la Loire, les administrations s'empresserent de se retracter pour
eviter d'etre mises hors la loi. La constitution, transportee en tous
lieux, etait le pretexte d'une soumission nouvelle. La convention,
disait-on, n'entendait ni s'eterniser, ni s'emparer du pouvoir,
puisqu'elle donnait une constitution; cette constitution devait terminer
bientot le regne des factions, et paraissait contenir le gouvernement le
plus simple qu'on eut jamais vu. Pendant ce temps, les municipalites
montagnardes, les clubs jacobins, redoublaient d'energie, et les honnetes
partisans de la Gironde cedaient devant une revolution qu'ils n'avaient
pas assez de force pour combattre, et qu'ils n'auraient pas eu assez de
force pour defendre. Des ce moment, Toulouse chercha a se justifier. Les
Bordelais, plus prononces, ne se soumirent pas formellement, mais ils
firent rentrer leur avant-garde, et cesserent d'annoncer leur marche sur
Paris. Deux autres evenemens importans vinrent terminer les dangers de la
Convention, dans l'Ouest et le Midi: ce fut la defense de Nantes, et la
dispersion des rebelles de la Lozere.
On a vu les Vendeens a Saumur, maitres du cours de la Loire, et pouvant,
s'ils avaient apprecie leur position, faire sur Paris une tentative qui
eut peut-etre reussi, car la Fleche et le Mans etaient sans aucun moyen de
resistance. Le jeune Bonchamps, qui portait seul ses vues au-dela de la
Vendee, aurait voulu qu'on fit une incursion en Bretagne, pour se donner
un port sur l'Ocean, et marcher ensuite sur Paris. Mais il n'y avait pas
assez de genie chez ses compagnons d'armes pour qu'il fut compris. La
veritable capitale, sur laquelle il fallait marcher, selon eux, c'etait
Nantes: ni
|