les, et que d'ailleurs les
marchands ne peuvent pas se donner le mot aussi rapidement que des
agioteurs reunis dans une salle. La difference, determinee d'abord a la
bourse, ne se prononcait donc ailleurs qu'apres un temps plus ou moins
long; l'assignat de 5 francs, qui deja n'en valait plus que 2 a la bourse,
en valait encore 3 dans les marches, et les agioteurs avaient ainsi
l'intervalle necessaire pour speculer. Ayant leurs capitaux tout prets,
ils prenaient du numeraire avant la hausse; des qu'il montait par rapport
aux assignats, ils l'echangeaient contre ceux-ci; ils en avaient une plus
grande quantite, et, comme la marchandise n'avait pas eu le temps de
monter encore, avec cette plus grande quantite d'assignats ils se
procuraient une plus grande quantite de marchandises, et la revendaient
quand le rapport s'etait retabli. Leur role consistait a occuper le
numeraire et la marchandise pendant que l'un et l'autre s'elevaient par
rapport a l'assignat. Leur profit n'etait donc que le profit constant de
la hausse de toutes choses sur l'assignat, et il etait naturel qu'on leur
en voulut de ce benefice toujours fonde sur une calamite publique. Leur
jeu s'etendait sur la variation de toutes les especes de valeurs, telles
que le papier etranger, les actions des compagnies, etc. Ils profitaient
de tous les accidens qui pouvaient produire des differences, tels qu'une
defaite, une motion, une fausse nouvelle. Ils formaient une classe assez
considerable. On y comptait des banquiers etrangers, des fournisseurs, des
usuriers, d'anciens pretres ou nobles, de recens parvenus
revolutionnaires, et quelques deputes qui, pour l'honneur de la
convention, n'etaient que cinq ou six, et qui avaient l'avantage perfide
de contribuer a la variation des valeurs par des motions faites a propos.
Ils vivaient dans les plaisirs avec des actrices, des ci-devant
religieuses ou comtesses, qui, du role de maitresses, passaient
quelquefois a celui de negociatrices d'affaires. Les deux principaux
deputes engages dans ces intrigues etaient Julien, de Toulouse, et
Delaunay, d'Angers, qui vivaient, le premier avec la comtesse de Beaufort,
le second avec l'actrice Descoings. On pretend que Chabot, dissolu comme
un ex-capucin, et s'occupant quelquefois des questions financieres, se
livrait a cet agiotage, de compagnie avec deux freres, nommes Frey,
expulses de Moravie pour leurs opinions revolutionnaires, et venus a Paris
pour y faire le commerce de la banque
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