au champ meme de la federation. La, le cortege se divise en deux
colonnes, qui s'allongent autour de l'autel de la patrie. Le president de
la convention et les quatre-vingt-six doyens occupent le sommet de
l'autel; les membres de la convention et la masse des envoyes des
assemblees primaires en occupent les degres. Chaque groupe de peuple vient
deposer alternativement autour de l'autel les produits de son metier, des
etoffes, des fruits, des objets de toute espece. Le president de la
convention, recueillant ensuite les actes sur lesquels les assemblees
primaires ont inscrit leurs votes, les depose sur l'autel de la patrie.
Une decharge generale d'artillerie retentit aussitot; un peuple immense
joint ses cris aux eclats du canon, et on jure, avec le meme enthousiasme
qu'aux 14 juillet 1790 et 1792, de defendre la constitution: serment bien
vain, si on considere la lettre de la constitution, mais bien heroique et
bien observe, si on ne considere que le sol et la revolution elle-meme!
Les constitutions en effet ont passe, mais le sol et la revolution furent
defendus avec une constance heroique.
Apres cette ceremonie, les quatre-vingt-six doyens d'age remettent leurs
piques au president; celui-ci en forme un faisceau, et le confie, avec
l'acte constitutionnel, aux deputes des assemblees primaires, en leur
recommandant de reunir toutes leurs forces autour de l'arche de la
nouvelle alliance. On se separe ensuite; une partie du cortege accompagne
l'urne cineraire des Francais morts pour la patrie, dans un temple destine
a la recevoir; le reste va deposer l'arche de la constitution dans un lieu
ou elle doit rester en depot jusqu'au lendemain, pour etre rapportee
ensuite dans la salle de la convention. Une grande representation,
figurant le siege et le bombardement de Lille, et la resistance heroique
de ses habitans, occupe le reste de la journee, et dispose l'imagination
du peuple aux scenes guerrieres.
Telle fut cette troisieme federation de la France republicaine. On n'y
voyait pas, comme en 1790, toutes les classes d'un grand peuple, riches et
pauvres, nobles et roturiers, confondus un instant dans une meme ivresse,
et fatigues de se hair, se pardonnant pour quelques heures leurs
Differences de rang et d'opinion; on y voyait un peuple immense, ne
parlant plus de pardon, mais de danger, de devouement, de resolutions
desesperees, et jouissant avec ivresse de ces pompes gigantesques, en
attendant de courir le lendemain sur l
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