p moins redoutable. Ses bataillons, rejetes au-dela
de la Durance par Carteaux, ne pouvaient opposer une longue resistance;
mais elle avait communique a la ville de Toulon, jusque-la si
republicaine, son esprit de revolte. Ce port, l'un des premiers du monde,
et le premier de la Mediterranee, faisait envie aux Anglais, qui
croisaient devant ses rivages. Des emissaires de l'Angleterre y
intriguaient sourdement, et y preparaient une trahison infame. Les
sections s'y etaient reunies le 13 juillet, et, procedant comme toutes
celles du Midi, avaient destitue la municipalite et ferme le club jacobin.
L'autorite, transmise aux mains des federalistes, risquait de passer
successivement, de factions en factions, aux emigres et aux Anglais.
L'armee de Nice, dans son etat de faiblesse, ne pouvait prevenir un tel
malheur. Tout devenait donc a craindre, et ce vaste orage, amoncele sur
l'horizon, du Midi, s'etait fixe sur deux points, Lyon et Toulon.
Depuis deux mois, la situation s'etait donc expliquee, et le danger, moins
universel, moins etourdissant, etait mieux determine et plus grave. A
l'Ouest, c'etait la plaie devorante de la Vendee; a Marseille, une
sedition obstinee; a Toulon, une trahison sourde; a Lyon, une resistance
ouverte et un siege. Au Rhin et au Nord, c'etait la perte des deux
boulevarts qui avaient si long-temps arrete la coalition et empeche
l'ennemi de marcher sur la capitale. En septembre 1792, lorsque les
Prussiens marchaient sur Paris et avaient pris Longwy et Verdun; en avril
1793, apres la retraite de la Belgique, apres la defaite de Nerwinde, la
defection de Dumouriez et le premier soulevement de la Vendee; au 31 mai
1793, apres l'insurrection universelle des departemens, l'invasion du
Roussillon par les Espagnols, et la perte du camp de Famars; a ces trois
epoques, les dangers avaient ete effrayans, sans doute, mais jamais
peut-etre aussi reels qu'a cette quatrieme epoque d'aout 1798. C'etait la
quatrieme et derniere crise de la revolution. La France etait moins
ignorante et moins neuve a la guerre qu'en septembre 1792, moins effrayee
de trahisons qu'en avril 1793, moins embarrassee d'insurrections qu'au
31 mai et au 12 juin; mais, si elle etait plus aguerrie et mieux obeie,
elle etait envahie a la fois sur tous les points, au Nord, au Rhin, aux
Alpes, aux Pyrenees.
Cependant on ne connaitrait pas encore tous les maux qui affligeaient
alors la republique, si on se bornait a considerer seulement les cinq
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