l'entretien de
ses nombreux habitans.
"Et sept cent mille hommes depourvus de tout s'entre-devoreront."
Le peuple n'avait plus pille; mais il demandait toujours des mesures
terribles contre les marchands, et on a vu le pretre Jacques Roux ameuter
les cordeliers, pour faire inserer dans la constitution un article relatif
aux accapareurs. On se dechainait beaucoup aussi contre les agioteurs, qui
faisaient, dit-on, augmenter les marchandises, en speculant sur les
assignats, l'or, l'argent et le papier etranger.
L'imagination populaire se creait des monstres et partout voyait des
ennemis acharnes, tandis qu'il n'y avait que des joueurs avides, profitant
du mal, mais ne le produisant pas, et n'ayant certainement pas la
puissance de le produire. L'avilissement des assignats tenait a une foule
de causes: leur quantite considerable, l'incertitude de leur gage qui
devait disparaitre si la revolution succombait; leur comparaison avec le
numeraire qui ne perdait pas sa realite, et avec les marchandises qui,
conservant leur valeur, refusaient de se donner contre une monnaie qui
n'avait plus la sienne. Dans cet etat de choses, les capitalistes ne
voulaient pas garder leurs fonds sous forme d'assignats, parce que sous
cette forme ils deperissaient tous les jours. D'abord ils avaient cherche
a se procurer de l'argent; mais six ans de gene effrayaient les vendeurs
et les acheteurs de numeraire. Ils avaient alors songe a acheter des
marchandises; mais elles offraient un placement passager, parce qu'elles
ne pouvaient se garder long-temps, et un placement dangereux parce que la
fureur contre les accapareurs etait au comble. On cherchait donc des
suretes dans les pays etrangers. Tous ceux qui avaient des assignats
s'empressaient de se procurer des lettres de change sur Londres, sur
Amsterdam, sur Hambourg, sur Geneve, sur toutes les places de l'Europe;
ils donnaient, pour obtenir ces valeurs etrangeres, des valeurs nationales
enormes, et avilissaient ainsi les assignats en les abandonnant.
Quelques-unes de ces lettres de change etaient realisees hors de France,
et la valeur en etait touchee par les emigres. Des meubles magnifiques,
depouilles de l'ancien luxe, consistant en ebenisterie, horlogerie,
glaces, bronzes dores, porcelaines, tableaux, editions precieuses,
payaient ces lettres de change qui s'etaient transformees en guinees ou en
ducats. Mais on ne cherchait a en realiser que la plus petite partie.
Recherchees par des capita
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