epute Duperret, ami de Garat. Ses collegues, qui la virent comme
lui, et comme lui l'entendirent exprimer sa haine contre les montagnards,
et son enthousiasme pour une republique pure et reguliere, furent frappes
de sa beaute et touches de ses sentimens. Tous ignoraient ses projets.
Arrivee a Paris, Charlotte Corday songea a choisir sa victime. Danton et
Robespierre etaient assez celebres dans la Montagne pour meriter ses
coups, mais Marat etait celui qui avait paru le plus effrayant aux
provinces, et qu'on regardait comme le chef des anarchistes. Elle voulait
d'abord frapper Marat au faite meme de la Montagne et au milieu de ses
amis; mais elle ne le pouvait plus, car Marat se trouvait dans un etat qui
l'empechait de sieger a la convention. On se rappelle sans doute qu'il
s'etait suspendu volontairement pendant quinze jours; mais, voyant que le
proces des girondins ne pouvait etre vide encore, il mit fin a cette
ridicule comedie, et reparut a sa place.
Bientot une de ces maladies inflammatoires qui, dans les revolutions,
terminent ces existences orageuses que ne termine pas l'echafaud,
l'obligea a se retirer et a rentrer dans sa demeure. La, rien ne pouvait
calmer sa devorante activite; il passait une partie du jour dans son bain,
entoure de plumes et de papiers, ecrivant sans cesse, redigeant son
journal, adressant des lettres a la convention, et se plaignant de ce
qu'on ne leur donnait pas assez d'attention. Il en ecrivit une derniere,
disant que, si on ne la lisait pas, il allait se faire transporter malade
a la tribune, et la lire lui-meme. Dans cette lettre, il denoncait deux
generaux, Custine et Biron. "Custine, disait-il, transporte du Rhin au
Nord, y faisait comme Dumouriez, il medisait des _anarchistes_, il
composait ses etats-majors a sa fantaisie, armait certains bataillons,
desarmait certains autres, et les distribuait conformement a ses plans,
qui, sans doute, etaient ceux d'un conspirateur." (On se souvient que
Custine profitait du siege de Valenciennes pour reorganiser l'armee du
Nord au camp de Cesar.) "Quant a Biron, c'etait un ancien valet de cour;
il affectait une grande crainte des Anglais pour se tenir dans la
Basse-Vendee, et laisser a l'ennemi la possession de la Vendee superieure.
Evidemment il n'attendait qu'une descente, pour lui-meme se reunir aux
Anglais et leur livrer notre armee. La guerre de la Vendee aurait du etre
deja finie. Un homme judicieux, apres avoir vu les Vendeens se battre un
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