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fois, devait trouver le moyen de les detruire. Pour lui, qui possedait
aussi la science militaire, il avait imagine une manoeuvre infaillible, et
si son etat de sante n'avait pas ete aussi mauvais, il se serait fait
transporter sur les bords de la Loire pour mettre lui-meme ce plan a
execution. Custine et Biron etaient les deux Dumouriez du moment; et,
apres les avoir arretes, il fallait prendre une derniere mesure qui
repondrait a toutes les calomnies, et engagerait tous les deputes sans
retour dans la revolution, c'etait de mettre a mort les Bourbons
prisonniers, et de mettre a prix la tete des Bourbons fugitifs. De cette
maniere on n'accuserait plus les uns de destiner Orleans au trone, et on
empecherait les autres de faire leur paix avec la famille des Capet.
C'etait toujours, comme on le voit, la meme vanite, la meme fureur, et la
meme promptitude a devancer les craintes populaires. Custine et Biron, en
effet, allaient devenir les deux objets de la fureur generale, et c'etait
Marat qui, malade et mourant, avait encore eu l'honneur de l'initiative.
Charlotte Corday, pour l'atteindre, etait donc obligee d'aller le chercher
chez lui. D'abord elle remit la lettre qu'elle avait pour Duperret,
remplit sa commission aupres du ministre de l'interieur, et se prepara a
consommer son projet. Elle demanda a un cocher de fiacre l'adresse de
Marat, s'y rendit, et fut refusee. Alors elle lui ecrivit, et lui dit
qu'arrivee du Calvados, elle avait d'importantes choses a lui apprendre.
C'etait assez pour obtenir son introduction. Le 13 juillet, en effet, elle
se presente a huit heures du soir. La gouvernante de Marat, jeune femme de
vingt-sept ans, avec laquelle il vivait maritalement, lui oppose quelques
difficultes; Marat, qui etait dans son bain, entend Charlotte Corday, et
ordonne qu'on l'introduise. Restee seule avec lui, elle rapporte ce
qu'elle a vu a Caen, puis l'ecoute, le considere avant de le frapper.
Marat demande avec empressement le nom des deputes presens a Caen; elle
les nomme, et lui, saisissant un crayon, se met a les ecrire, en ajoutant:
"C'est bien, ils iront tous a la guillotine.--A la guillotine!..." reprend
la jeune Corday indignee; alors elle tire un couteau de son sein, frappe
Marat sous le teton gauche, et enfonce le fer jusqu'au coeur. "_A moi!_
s'ecrie-t-il, _a moi, ma chere amie!_" Sa gouvernante s'elance a ce cri;
un commissionnaire qui ployait des journaux accourt de son cote; tous deux
trouvent Ma
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