RESSE PUBLIQUE.--AGIOTAGE.
Des triumvirs si fameux, il ne restait plus que Robespierre et Danton.
Pour se faire une idee de leur influence, il faut voir comment s'etaient
distribues les pouvoirs, et quelle marche avaient suivie les esprits
depuis la suppression du cote droit.
Des le jour meme de son institution, la convention fut en realite saisie
de tous les pouvoirs. Elle ne voulut cependant pas les garder
ostensiblement dans ses mains, afin d'eviter les apparences du despotisme;
elle laissa donc exister hors de son sein un fantome de pouvoir executif,
et conserva des ministres. Mecontente de leur administration, dont
l'energie n'etait pas proportionnee aux circonstances, elle etablit,
immediatement apres la defection de Dumouriez, un comite de salut public,
qui entra en fonctions le 10 avril, et qui eut sur le gouvernement une
inspection superieure. Il pouvait suspendre l'execution des mesures prises
par les ministres, y suppleer quand il les jugeait insuffisantes, ou les
revoquer lorsqu'il les croyait mauvaises. Il redigeait les instructions
des representans envoyes en mission, et pouvait seul correspondre avec
eux. Place de cette maniere au-dessus des ministres et des representans,
qui etaient eux-memes places au-dessus des fonctionnaires de toute espece,
il avait sous sa main le gouvernement tout entier. Quoique, d'apres son
titre, cette autorite ne fut qu'une simple inspection, en realite elle
devenait l'action meme, car un chef d'etat n'execute jamais rien lui-meme,
et se borne a tout faire faire sous ses yeux, a choisir les agens, a
diriger les operations. Or, par son seul droit d'inspection, le comite
pouvait tout cela, et il l'accomplit. Il regla les operations militaires,
commanda les approvisionnemens, ordonna les mesures de surete, nomma les
generaux et les agens de toute espece, et les ministres tremblans se
trouvaient trop heureux de se decharger de toute responsabilite en se
reduisant au role de simples commis. Les membres qui composaient le comite
de salut public etaient Barrere, Delmas, Breard, Cambon, Robert Lindet,
Danton, Guyton-Morveau, Mathieu et Ramel. Ils etaient reconnus pour des
hommes habiles et laborieux, et quoiqu'ils fussent suspects d'un peu de
moderation, on ne les suspectait pas au point de les croire, comme les
girondins, complices de l'etranger. En peu de temps, ils reunirent dans
leurs mains toutes les affaires de l'etat, et bien qu'ils n'eussent ete
nommes que pour un mois, on
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