e Rhin, incendiaient l'interieur de la ville par
le cote le plus ouvert, et lui causaient un dommage considerable.
Cependant la derniere parallele n'etait pas encore ouverte, la premiere
enceinte n'etait pas encore franchie, et la garnison pleine d'ardeur ne
songeait point a se rendre. Pour se delivrer des batteries flottantes, de
braves Francais se jetaient a la nage, et allaient couper les cables des
bateaux ennemis. On en vit un amener a la nage un bateau charge de
quatre-vingts soldats, qui furent faits prisonniers.
Mais la detresse etait au comble. Les moulins avaient ete incendies, et il
avait fallu recourir, pour moudre le grain, a des moulins a bras. Encore
les ouvriers ne voulaient-ils pas y travailler, parce que l'ennemi,
averti, ne manquait pas d'accabler d'obus le lieu ou ils etaient places.
D'ailleurs on manquait presque tout a fait de ble; depuis long-temps on
n'avait plus que de la chair de cheval; les soldats mangeaient des rats,
et allaient sur les bords du Rhin pecher les chevaux morts que le fleuve
entrainait. Cette nourriture devint funeste a plusieurs d'entre eux; il
fallut la leur defendre, et les empecher meme de la rechercher, en placant
des gardes au bord du Rhin. Un chat valait six francs; la chair de cheval
Mort quarante-cinq sous la livre. Les officiers ne se traitaient pas mieux
que les soldats, et Aubert-Dubayet, invitant a diner son etat-major, lui
fit servir comme regal, un chat flanque de douze souris. Ce qu'il y avait
de plus douloureux pour cette malheureuse garnison, c'etait la privation
absolue de toute nouvelle. Les communications etaient si bien
interceptees, que depuis trois mois elle ignorait absolument ce qui se
passait en France. Elle avait essaye de faire connaitre sa detresse,
tantot par une dame qui allait voyager en Suisse, tantot par un pretre qui
avait pris le chemin des Pays-Bas, tantot enfin par un espion qui devait
traverser le camp ennemi. Mais aucune de ces depeches n'etait parvenue.
Esperant que peut-etre on songerait a leur envoyer des nouvelles du
Haut-Rhin, au moyen de bouteilles jetees dans le fleuve, les assieges y
placerent des filets. Ils les levaient chaque jour, mais ils n'y
trouvaient jamais rien. Les Prussiens, qui avaient pratique toute espece
de ruses, avaient fait imprimer a Francfort de faux _Moniteurs_, portant
que Dumouriez avait renverse la convention, et que Louis XVII regnait avec
une regence. Les Prussiens places aux avant-postes transmettaient
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